Cela ne vous aura pas échappé, la France remplace actuellement plus souvent ses défaillants gouvernements successifs qu’une entreprise ne renouvelle ses jeunes apprentis motivés et actifs. Durée moyenne en apprentissage, 3 ans. Durée moyenne au gouvernement : 3 mois. Tout est dit, ou presque.
L’ambiance est : Chaotique.
Dans ce tumulte indescriptible, une portion de nos valeureux compagnons était spécialement visée, qualifiée de « favorisés ». Je fais effectivement référence à nos apprentis, dont le régime spécial est avant tout une motivation pour l’avenir, dans des métiers que tout le monde fuit. Brandir une scie circulaire en bout d’échelle par 5 degré Celsius au petit matin, ce n’est pas « à proprement parler », un régime de faveur.
Une victoire pour les apprentis ! La note de la rédaction
L’Assemblée nationale rejette la suppression des exonérations fiscales dans le PLFSS 2026. Et c’est tant mieux !
Dans un hémicycle agité par des débats enflammés, l’Assemblée nationale a porté un coup d’arrêt, le 7 novembre dernier, à une mesure controversée du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026. La suppression de l’exonération des cotisations salariales sur la rémunération des apprentis, prévue à l’article 9 du texte gouvernemental, a été massivement rejetée par 232 voix contre 3. Une décision qui soulage des milliers de jeunes en formation et qui met en lumière les tensions budgétaires d’un gouvernement qui cherchait à équilibrer les comptes publics en sacrifiant l’avenir de la jeunesse.
En jeu ? Le revenu, et l’attractivité de nos métiers dont nous savons qu’ils sont pénibles, mêmes pour les jeunes gens les plus motivés.
Dès lors, comment pouvons nous accepter qu’il soit ainsi systématiquement mis en balance un contexte d’enjeu éducatif, professionnel, et humain d’une part, et un amoncèlement de chiffres négatifs dont la négativité est due à tout, sauf à cela. Il est clairement question de « coupe », de « tranche », et de vider une « partie » de l’enseignement de ses élèves. Car ne soyons pas dupes, un apprenti gagne une somme dérisoire, pour un travail qui est quant à lui réellement accompli. Les entreprises misent du temps sur ces jeunes gens, car ils sont « en devenir » nos professionnels de demain. Les apprentis acceptent de délivrer un travail conséquent contre une maigre rémunération, justement pour les mêmes raison.
C’est une voie vertueuse et ancestrale, qui devient « au dire de notre gouvernement » : Un régime de faveur.
Ceux qui vont mourir te salue !
Un régime de faveur ?
Retour sur le statut privilégié de l’apprenti.
Les avantages fiscaux en jeu, et ce qui aurait pu advenir si le texte avait été adopté tel quel.
Le statut de l’apprenti : Un tremplin vers une carrière solide.
En France, l’apprentissage n’est pas qu’une formation : C’est un véritable contrat de travail, régi par le Code du travail (articles L.6211-1 et suivants). L’apprenti, âgé généralement de 16 à 29 ans, bénéficie d’un statut spécifique de salarié et d’élève. Il alterne entre cours théoriques en centre de formation d’apprentis (CFA) et pratique en entreprise, sous la tutelle d’un maître d’apprentissage.
Ce modèle, promu depuis les réformes de 2018 et 2020, vise à favoriser l’insertion professionnelle : En 2023, près de 500 000 contrats ont été signés, un record historique selon l’INSEE. Malgré ce statut de salarié à part entière (avec droit à la protection sociale, aux congés payés et à une rémunération minimale), l’apprenti jouit de mesures incitatives pour encourager son embauche. La rémunération, fixée en pourcentage du SMIC (de 27 % en première année pour un mineur à 100 % en dernière année pour un majeur), est versée mensuellement.
Mais c’est surtout sur le plan fiscal et social que le régime se distingue, rendant l’apprentissage attractif pour les jeunes souvent issus de milieux modestes. Au delà ce ça, c’est une continuité entre le maître d’apprentissage et son apprenti, qui génère des générations et des générations de « sachants ». La voie est vertueuse, solide, et noble.
Des coupes agressives et successives
Les avantages fiscaux et sociaux : un filet de sécurité pour les jeunes travailleurs.
Les exonérations constituent le cœur du dispositif. D’une part, pour l’apprenti lui-même : Son salaire est exonéré d’impôt sur le revenu dans la limite du SMIC annuel brut (21 273 euros pour 2024, selon le BOFiP-Impôts). Au-delà, seule la fraction excédentaire est imposable, ce qui permet à la plupart des apprentis de conserver un net proche du brut. De plus, jusqu’à récemment, une exonération totale de cotisations salariales (sécurité sociale, CSG, CRDS) s’appliquait sur la totalité de la rémunération, rendant le salaire net quasi intégral. D’autre part, l’employeur profite d’aides : exonération quasi-totale des cotisations patronales (sauf accidents du travail), et une aide unique de l’État (jusqu’à 6 000 euros par an pour les moins de 21 ans).
Ces mesures, financées par les régions via des indemnités compensatrices (minimum 1 000 euros par an), visent à compenser les coûts de formation. Résultat : un apprenti coûte environ 20 à 30 % moins cher qu’un salarié classique, tout en bénéficiant d’une protection sociale équivalente. Mais ces avantages ont déjà été rognés. Le PLFSS 2025 a réduit l’exonération des cotisations salariales de 79 % à 50 % du SMIC pour les contrats signés après mars 2025, et limité l’exonération CSG/CRDS au même seuil. Une première entaille qui avait déjà suscité des grincements de dents, avec une perte estimée à 50-100 euros nets par mois pour les apprentis.
Rappelons également la fin de l’aide de 500 euros pour que les apprentis adultes puissent passer leur permis de conduire.
Un retour « à la normale » pour le PLFSS de 2026
Le PLFSS 2026 : une mesure d’économie qui divise.
Présenté le 14 octobre 2025 en Conseil des ministres par le gouvernement Lecornu, le PLFSS 2026 visait 12 à 15 milliards d’euros d’économies pour « préserver le modèle social tout en restaurant les marges budgétaires ». Parmi les « dispositifs coûteux » ciblés : La fin pure et simple de l’exonération des cotisations salariales sur la fraction de rémunération jusqu’à 50 % du SMIC, pour les nouveaux contrats à partir du 1er janvier 2026. L’impact ? 320 millions d’euros d’économies en 2026, grimpant à 1,2 milliard en 2027, selon l’évaluation gouvernementale.
Concrètement, cela aurait amputé le salaire net des apprentis de 100 à 187 euros par mois, selon leur âge et leur niveau de formation, alerte l’Association nationale des apprentis de France (ANAF).Le texte ne touchait pas les contrats en cours, mais visait le « flux » des nouveaux entrants. « Une rationalisation nécessaire », plaidait le ministre du Travail, Jean-Pierre Farandou, lors des débats.
Mais la mesure a vite tourné au vinaigre.
Dès la commission des Affaires sociales, le 28 octobre, les députés ont adopté des amendements de suppression, portés par les socialistes et les écologistes. En séance plénière, le 7 novembre, un amendement transpartisan (gauche, extrême droite, et même majorité gouvernementale) a scellé son sort, dans un brouhaha de protestations. « C’est une attaque contre notre jeunesse qui travaille », tonnait Alexandre Loubet (RN), tandis que Jean-Claude Raux (Écologistes) dénonçait une « exploitation des plus vulnérables ».
Des études controversée, et inaudibles
Audrey Gally, avocate et conseillère, tente de nous faire comprendre un discours inaudible dans une intervention du 16 Juillet 2025.
Qui comprend son propos ? Personne. Nous avons visionné, et revisionné son intervention plusieurs fois et nous sommes dépités. Rien n’est compréhensible dans son discours, hormis une phrase à la minute 4.02 de la présente vidéo : La réduction des aides.
C’est bluffant, car c’est clairement la seule allégation compréhensible de son discours : Réduire les aides à l’apprentissage.
- Réduction de l’aide unique (entreprises de – de 250 salariés) : Nous l’évoquons dans un de nos précédents articles, c’est une coupe franche sur l’aide financière pour les maîtres d’apprentissage. Réduction de 6 000 à 5 000 euros sur un contrat.
- Réduction de l’aide exceptionnelle (toutes les entreprises sont concernées) : Aide réduite de 6 000 à 2 000 euros pour les entreprises de + de 250 salariés.
- Réduction des exonérations favorables aux apprentis : Application de la CSG-CRDS applicable aux apprentis (alors qu’elle ne l’était pas avant 2025) et réduction du seuil de cotisation salariale de l’apprenti jusqu’à 79% du SMIC réduite à 50 %
Tout cela évidemment, avec un grand sourire.
Selon Audrey Gally, ces différentes mesures « ne sont toujours pas suffisantes pour retrouver un équilibre entre les contributions et les besoins de financements ». Audrey nous dit elle-même, que le dispositif de l’apprentissage et un dispositif qui fonctionne particulièrement bien, justement car il est favorisé. Minute 5.38 de la vidéo ci-dessus. La suite est inaudible, car l’avocate nous explique que ce dispositif peut être amélioré, en le supprimant car il doit répondre aux besoin du marché.
Nous vous laissons juges des propos de Me Gally, incohérents et sans épaisseur, dont le seul objectif est évidemment de critiquer l’une des rares spécificités qui fait l’honneur des artisans et des industriels en France, nous avons nommé : L’apprentissage.
« On souhaitait gagner en lisibilité, au travers de la réforme. Il y a certes un sujet financier, mais nous souhaitions gagner un lisibilité. » Fin de citation.
NOTE DE LA REDACTION : C’est donc clair, l’apprentissage n’est pas un sujet de stratégie publique pour nos jeunes, c’est une simple ligne sur une feuille Excel qu’il faut gommer. Si les entreprises peuvent financer les CFA, l’état quant à lui, ne le souhaite plus. C’est indigeste, et inaudible. NdlR (Serge USTUN).
Une révolte transpartisane
A la rédaction, nous saluons le discours de Eric Michoux (LR) qui qualifie cette mesure « d’antichambre de la fin de l’apprentissage ». Il décrit avec force l’amalgame entre un apprenti et un collaborateur déjà formé, en témoignant très justement que l’apprenti demeure un élève, avant tout. Mais ici, tous les partis s’en mêlent, et plus particulièrement à la gauche de l’hémicycle. Le député Hednrik Davi (en photo plus haut dans l’article) Professeur, dans le segment écologie et sociale de l’AN, se réjouit de la suppression du texte.
Edouard Bénard, du Parti Communiste (PCF) : « La filière de l’apprentissage survit ». Ou de rétorquer » c’est l’aveu d’un échec cuisant », faisant allusion à la suppression des aides pour l’apprentissage car disons le clairement, le PCF critique bien souvent le sort des apprentis comme étant une main d’œuvre « facile » pour le patronat. Or ici il est question de l’individu, autrement dit de l’apprenti lui-même, qui va souffrir des égarement de plusieurs gouvernements inefficaces en matière d’économie.
« Joachim, boulanger, moins 161 euros par mois ! et qui peut vivre avec 613 euros par mois sincèrement ? » scande l’élu communiste. A juste titre d’ailleurs. « Ce sont des carrières menacées, et des filières d’excellence mises sur la sellette ».
Il semble donc que les élus, quels que soient leurs bords politiques, refusent ce « couperet » supplémentaire à la filière du bâtiment mais surtout, à ce qu’elle représente : La transmission du savoir. Les gouvernements successifs de ces deux dernières années n’auront finalement pas tenu la longueur, s’il était question d’engagement comme c’est le cas pour un CAP ou pour un BEP.
Pour combien de temps ? Le sursis qui menace nos apprentis
Le cauchemar est évité, mais pour combien de temps ?
Si le texte avait été voté tel quel, les conséquences auraient été lourdes. Pour un apprenti en première année (rémunération à 43 % du SMIC, soit environ 800 euros brut), la perte nette aurait atteint 100 euros mensuels, privant ces jeunes (souvent autonomes pour la première fois) de subsides légitimes pour le logement ou les transports.
L’ANAF estimait un « effet domino » : Baisse de pouvoir d’achat, découragement à l’embauche, et potentielle hausse du décrochage scolaire. Ajoutée à la suppression parallèle de l’aide au permis de conduire (500 euros, prévue dans le PLF 2026), cela aurait fragilisé un système déjà sous tension dans un contexte de ralentissement économique.
Heureusement, le rejet massif préserve le statu quo : Les nouveaux apprentis de 2026 conserveront leur exonération jusqu’à 50 % du SMIC, maintenant un net attractif. Mais ce n’est pas une victoire définitive. Le PLFSS doit encore passer au Sénat, puis en commission mixte paritaire. Le gouvernement, par la voix de Laurent Panifous, appelle à « poursuivre le débat jusqu’au bout », et des compromis comme un seuil réduit à 25 % pourraient resurgir.
Reste que cet épisode illustre les limites d’un budget contraint par de médiocres pensants : Entre impératifs d’économies et protection de l’insertion professionnelle, les apprentis ont, pour l’instant, gagné une bataille symbolique. En fin de compte, cette décision renforce l’apprentissage comme pilier de l’emploi des jeunes. Mais face à un déficit public persistant, la tentation de revenir à la charge n’est jamais loin. Les apprentis, eux, appellent de leurs vœux une stabilité fiscale pour se concentrer sur l’essentiel : Apprendre un métier.
Merci pour vos lectures et bon chantier.
Serge USTUN.






