L’édito de ce mois de Juillet est sans aucun doute le plus important du magazine à ce jour.
A la veille d’une étrange et inquiétante instabilité politique au sein de notre pays, et au seuil d’une confirmation que je redoutais depuis déjà fort longtemps : Les opérationnels disparaissent.
Les hommes et femmes de l’art, celles et ceux qui bâtissent, se réduisent tel une peau de chagrin.
Le magazine, plus que jamais, doit s’enraciner dans le réel, et dans l’opérationnel. La seule démonstration par l’acquis de compétences doit primer, à défaut de s’imposer.
Les gens qui nous lisent méritent une information avérée, car ils se détournent faute de conseils avisés, vers des contenus lissés, faux, et sans épaisseur.
Parmis eux, de potentiels futurs apprentis, qui avant même d’avoir édifié leur premier ouvrage seront biaisés par la « normalisation » d’un discours établi par des blogueurs, des comptables, ou des IA.
Les théoriciens, les commentateurs, les « manucurés » ne doivent pas créer le bâtiment de manière fantasmée, à leur guise, mais au contraire, s’enrichir et apprendre à nos cotés, nous qui sommes sur le terrain, les mains dans le mortier.
Les émissions télévisées, les chaînes YouTube, les magazines DIY et pire encore, les journalistes spécialisés n’ont jamais œuvré dans le bâtiment, autrement qu’à l’occasion d’une pose de papier peint un jour d’été dans la maison familiale.
Le bâtiment n’est pas un hobby, ce n’est pas un passe temps.
L’opérationnel se perd, avec lui se perdra la connaissance, la pertinence, et l’art, première syllabe du mot « Artisanat ».
Comme je l’évoquais récemment, concernant la RSE, mode pseudo intellectuelle qui serait intéressante si elle émanait du terrain et non des réunions de com’, nous continuons à être au second plan des enjeux, car nous mettons notre énergie à l’ouvrage, oubliant que nous n’en sommes pas les maîtres.
Je m’oppose aux articles rédigés par des IA, alors même que ceux qui les utilisent sont aujourd’hui nos propres donneurs d’ordres.
Je m’étais un jour, par excès d’ego très certainement, fermé à toute discussion lors des Dircoms en revendiquant le fait que j’étais le seul individu issu du bâtiment, et que je ne pouvais pas passer ma vie à discuter de mon métier à des gens qui n’en sont pas issus : Les manucurés.
Plus que jamais, les artisans, les architectes, les ingénieurs doivent s’interroger. Les deux seconds vont disparaitre, l’IA les surpasse aujourd’hui très largement.
Reste donc les Artisans. Artisans qui en position de monopole, perdent les initiatives, paradoxalement.
Les start-up, plateformes de mise en relation client / artisan, ne s’en cachent même plus : Elles propulsent des « bricoleurs », qui proposent des « jobs » dans le bâtiment, sans garantie, sans décennale, et surtout : sans formation.
Ainsi, Jacques, boulanger la semaine, pourra rénover la salle de bain de Julie, moyennant une forme de mise aux enchères du prix de la prestation et foulant ainsi au pied, la notion même d’artisanat.
Je n’ai vu personne s’insurger de ces pratiques, aujourd’hui largement développées, et les épingler commes ce qu’elles sont : Une usurpation de l’art et du métier.
La Capeb, la FFB, les organismes de formations n’ont aucun souci avec ces concepts, qu’ils sont censés combattre.
Pour finir, sur la partie purement éditoriale, nous devons nous réapproprier l’espace, en format lecture ou audio visuel.
Les experts web, experts SEO, « passionnés de bricolage », et autres amoureux de la déco ne doivent pas conduire la mesure en matière de construction et de bâti.
Ce domaine est une discipline magistrale.
En laissant ainsi se dévoyer l’information, nous nous engageons sur une voie où se mêle médiocrité begnine et risque majeur d’accidentologie, de malfaçon et de perte définitive de compétences.
Par conséquent, je mets à profit ces deux mois d’été pour esquisser tout un « lot » d’articles à venir, qui seront sans aucun doute de très haut niveau.
Ces derniers seront gratuits évidemment mais ne seront accessibles qu’aux lecteurs et lectrices abonnés (gratuitement) au magazine, échappant ainsi à une lecture en diagonale des IA qui seraient tentées de venir s’abreuver au puits d’un savoir durement construit par des décennies de terrain.
Rendez vous en septembre, pour les premiers articles « magistraux ».
Amis lecteurs, bonnes vacances !
Serge Ustun