Isolation de toiture terrasse : Le changement de paradigme

Le sujet de l’isolation de toiture terrasse fut longtemps tranché par la méthode dite du 1/3 – 2/3 dont nous savons qu’elle n’est pas pertinente. Aujourd’hui, revirement de paradigme et consolidation du process : On isole par le dessus uniquement.

Je reviens sur ce sujet longtemps éludé des professionnels et pour cause : Nous étions dans le faux !

Isoler est une science, alors soyons pragmatiques et ne laissons plus circuler les méthodes inefficaces. Toiture terrasse et dalle béton : C’est 100 % d’isolant par l’extérieur.

 

 

Avant propos

Ce dossier s’inscrit dans une thématique précise que nous analyserons ultérieurement en abordant la notion des « toitures froides » et « toitures chaudes ».

En revanche, nous pouvons aujourd’hui faire la lumière sur un sujet de tout temps polémique : L’isolation d’une toiture terrasse dans son format dalle béton.

Je vous propose que nous établissions une fois pour toute le consensus autour de ce sujet.

 

NORMES référentes : NF DTU 43.1 / NF EN 12664 / NF EN 12667 / NF EN 12939

 

Isolation de toiture terrasse : la polémique

Avec la montée en puissance des toitures terrasses, notamment parmi les constructeurs de maisons individuelles, s’est posée la question de l’isolation. Comment répartir l’isolant, entre la paroi en sous face de dalle et l’extérieur de cette dernière ? Doit-on positionner l’isolant dessus, dessous, ou répartir les épaisseurs ?

Pendant longtemps, la thèse du 1/3 – 2/3 a régné en valeur absolue et incontestée. Ce fut une erreur.

La création du point de rosée au droit des dalles en béton est devenue : Polémique.

Aujourd’hui, fort heureusement, avec le concours des bureaux d’études et des industriels, le paradigme se renverse. La nouvelle donne est simple : On isole par dessus.

• La toiture froide : Dans le cadre d’une toiture froide, l’isolant est placé sous la dalle avec généralement la création d’une lame d’air de ventilation et la pose d’un pare-vapeur pour protéger ce dernier.
• La toiture chaude : Dans le cadre d’une toiture chaude, l’isolant est placé sur la dalle avant de recevoir la membrane d’étanchéité.

 

 

Changement de paradigme : L’isolation de toiture terrasse fait consensus

Les planchers techniques modernes de types poutrelles et hourdis sont l’idéal pour créer un plancher haut, autrement dit la dalle béton du toit terrasse. Or ce sont très justement les industriels du secteur qui nous livrent aujourd’hui leurs constats : On isole par dessus et on arrête de tergiverser !

Nous pouvons clairement faire confiance aux professionnels du secteur car ces derniers se fondent dorénavant sur les calculs poussés et terriblement précis des logiciels pour thermiciens. L’expérience de terrain associée à la puissance des calculs modernes devient un gage de fiabilité.

Au delà de ce simple fait, nous avons testé et la question n’est plus à l’ordre du jour. Ce ne sont pas les chantiers qui manquent en terme de toiture terrasse et j’ai fait mon travail : Aller vérifier in situ la pertinence des différents choix d’isolation.

Par conséquent, je valide le procédé sans aucune ambiguïté : On isole par dessus.

 

La résistance thermique des toitures terrasses

La France est divisée en « zones » pour le calcul des résistances thermiques nécessaires. Ces zones correspondent généralement aux contrastes de température du territoire. A cela, il faut ajouter les zones de montagnes qui nécessitent une résistance thermique des matériaux plus importante. A noter que pour la RE2020 les zones sont subdivisées en 8 secteurs, or la résistance thermique n’est pas une valeur absolue de la RE. Il faut prendre en compte l’ensemble du bâtiment.

 

Ci-dessus : Document officiel de 2022 que vous devez réviser pour 2025 avec les éléments ci-dessous :

 

Mise à jour des données : Résistance thermique exigée

• R = 4,5 m2.K/W en zone climatique H1.
• R = 4,3 m2.K/W en zone climatique H2.
• R = 4 m2.K/W en zone climatique H3.

 

Correspondance sommaire en épaisseur des isolants :

• Polystyrène extrudé (XPS) : de 12 à 15 cm.
• Polyuréthane (PU) : de 10 à 12 cm.
• Laine de roche : de 15 à 20 cm.

 

 

• Tableau récapitulatif de résistance thermique sur le site SINIAT.
• Consulter le document explicatif du gouvernement pour la résistance thermique.

 

Nota : Il existe une valeur erronée qui circule actuellement sur de nombreux sites évoquant une résistance thermique de 8 m2.K/W pour les toitures terrasses. Cette donnée est évidemment non fondée. La RE2020 n’exige pas un R de 8 mais une performance globale du bâtiment.

 

Simulations

Pour accompagner le raisonnement avec des cas de figure simulé sur logiciel, il est possible d’obtenir des résultats précis qui vont dans le sens du « 100% d’isolation » de la toiture terrasse par l’extérieur. Je vous laisse découvrir les résultats des simulations ci-dessous :

 

1. Simulation Hiver : L’isolant est placé sur la dalle

• 19° dans un volume chauffé intérieur avec 65% d’humidité.
• -5 ° de température extérieure.
• Plénum de 200 mm.
• Dalle béton.
• Isolation extérieur PUR de 120 mm.
• Membrane d’étanchéité.
• Résultat : Un léger point de rosée apparait au dessus de l’isolant? La solution est admissible.

 

2. Simulation été : L’isolant est placé sur la dalle

• 22° dans un volume rafraichi intérieur avec 65% d’humidité.
• 32 ° de température extérieure.
• Plénum de 200 mm.
• Dalle béton.
• Isolation extérieur PUR de 120 mm.
• Membrane d’étanchéité.
• Résultat : Aucun point de rosée.

 

3. Simulation 1/3 – 2/3 en hiver : L’isolant est placé en partie sous la dalle et sur la dalle

• 19° dans un volume chauffé intérieur avec 65% d’humidité.
• -5 ° de température extérieure.
• Plaque de plâtre BA13
• Isolation GR32 de 100 mm
• Dalle béton.
• Isolation extérieur PUR de 200 mm.
• Membrane d’étanchéité.
• Résultat : Apparition du point de rosée sous la dalle béton au contact de l’isolant.

 

Le phénomène devient inquiétant dès 21° de température intérieure avec 1 kg d’eau par m² d’isolant dont 0.92 litres au droit de l’isolation intérieure. C’est la moisissure garantie sur les faux plafonds.

Pire cas de figure :

 

• 22° dans un volume chauffé intérieur avec 65% d’humidité.
• -5 ° de température extérieure.
• Plaque de plâtre BA13
• Isolation GR32 de 100 mm
• Dalle béton.
• Isolation extérieur PUR de 200 mm.
• Membrane d’étanchéité.
• Résultat : Forte création de condensation sous la dalle béton au contact de l’isolant.

 

4. Simulation 1/3 – 2/3 en été :

Aucun phénomène de point de rosée dans ce cas de figure en été.

 

La notion de plénum revue et corrigée

Maintenant que les choses sont claires, que le consensus est établi, il nous reste à ajouter une chose importante : Positionner la totalité de l’isolant sur la dalle (et non dessous) permet de redonner au plénum son sens réel originel. Autrement dit, on libère enfin le vide sous dalle et sur faux plafond pour qu’il remplisse définitivement son office : Créer un vide technique pour le passage des flux !

C’est du 100 % gagnant pour les appareillages et la ventilation.

Après avoir consulté de nombreux constructeurs, il semble que ce procédé soit dorénavant utilisé dans l’immense majorité des cas et les résultats confortent les hypothèses.

 

Comprendre la notion de plénum.

 

Isolation dessus / dessous : le point de rosée en cause

Le principal problème qui mène la vie dure à tous les ingénieurs thermiciens : le point de rosée. J’ai récemment rédigé un article sur ce sujet et je vous propose le lien en bas de paragraphe.

Pour les toitures terrasses en béton (ou dalles préfabriquées), le point de rosée rend les ingénieurs perplexes et la réalité du terrain leur donne raison.

Le point de rosée, toujours présent dans le cadre d’un mix isolation par dessous et par dessus la dalle, génère une dégradation de la performance des isolants et dans les cas les plus extrêmes : Une dégradation des faux plafonds.

 

Consulter mon dossier sur le point de rosée.

 

Les isolants les plus adaptés pour un toit terrasse

J’aimerai pouvoir ravir les partisans du développement durable en termes d’isolants mais dans ce cas précis, aucune alternative possible : Les isolants les plus adaptés aux toitures terrasses sont les matériaux en polystyrène et en polyuréthane (PU).

Autre avantage de ces derniers, ils sont particulièrement bien adaptés à la pose d’une étanchéité bitumineuse en revêtement définitif. Ce n’est pas la panacée, mais ça marche. En outre, la laine de roche vient tenter de se positionner sur le segment mais soyons honnêtes, ce sont tout de même les isolants inertes qui tiennent le secteur.

Pour rappel, en terme d’équivalence d’épaisseur les isolants inertes offrent de meilleures performances, mais demeurent moins écologiques.

 

Le bien fondé de l’isolation thermique extérieure

Je l’évoque très régulièrement dans mes articles, le procédé d’isolation le plus performant et le plus pertinent demeure l’isolation thermique extérieure. C’est donc évidemment le cas lorsqu’on évoque l’isolation de toiture terrasse.

 

 

Par conséquent, ce sujet ne me fera pas mentir, et s’inscrit en droite ligne de tout ce que nous analysons au travers des chantiers et de l’expérience de terrain.

Les ITE (Isolation Thermique Extérieure) sont les plus performantes.

Les principaux acteurs du segment de la dalle béton sont unanimes. Après un entretien avec un responsable technique de l’industriel SEAC nous sommes en mesure d’affirmer que seule une isolation par l’extérieur de la dalle est pertinente. Autrement dit, l’isolant posé sur la dalle, et le plénum vide.

Non seulement cela permet d’écarter définitivement ma création du point de rosée, mais cela permet surtout de redonner au plénum sa véritable fonction : Un vide technique libre et vacant.

 

• Consulter mon dossier sur l’isolation thermique extérieure.
• Consulter les dossiers techniques de SEAC sur l’isolation de toiture terrasse.

 

Le faux théorème du 1/3 – 2/3 en matière d’isolation

Vulgarisation poussée à l’extrême à grand renforts d’influenceurs peu exigeants, la théorie du 1/3-2/3 en matière d’isolation est devenue le paradigme de base. Et attention à celles et ceux qui souhaiteraient revenir sur ce dogme ! Ils seront châtiés !

Trêves de plaisanteries, les logiciels de calculs thermiques sont unanimes. Cette assertion est donc fausse, comme je n’ai de cesse de le rappeler. Nous l’avons prouvé plus haut dans le paragraphe des simulations réalisées à l’aide d’UBAKUS. Ce dernier faisant notoriété dans le domaine.

 

Les marques spécialisées

Plusieurs industriels proposent des isolants dédiés aux toitures terrasses et pour certains, depuis toujours. Je n’évoque ici que les leaders du marché, que vous connaissez déjà par ailleurs :

• SOPREMA
• UNILIN
• KNAUF
• ROCKWOOL

 

Quid des toitures végétalisées ?

La végétalisation d’une toiture est un excellent moyen d’isoler, cela ne fait aucun doute. En revanche il est rare et peu probable que seule la végétalisation soit utilisée pour une Isolation homogène et pertinente. En règle générale, cette dernière vient en complément d’un complexe isolant pré-existant.

Le schéma est donc identique à ce que nous venons de voir plus haut dans le présent article.

 

Lire mon article sur la toiture végétalisée.

 

La sinistralité

Vecteur d’humidité, la condensation retenue dans l’isolant en sous face de toiture terrasse est en cause dans de nombreux sinistres. Principalement, l’apparition de moisissures sur les parements en faux plafonds, puis dégradation de l’isolation, et enfin décollement des bandes à joints.

Le phénomène est rarement plus subtile, même s’il induit parfois en erreur. Effectivement, il est assez facile de s’imaginer qu’il s’agit d’une faiblesse dans l’étanchéité, alors que bien souvent c’est la condensation qui est en cause.

Cette erreur d’appréciation est légitime et nous tombons tous rapidement dans ce biais de raisonnement, moi le premier. Alors avant de diligenter une recherche de fuite, il faut avant tout se questionner sur la typologie de l’isolation sous toiture terrasse. Si le phénomène est saisonnier : C’est la condensation qui est coupable.

 

Liens utiles

• Guide de la RE2020 en PDF (site gouvernemental officiel).

 

Conclusion

En résumé, il n’est plus question de répartir l’isolation d’un toit terrasse en 1/3 et 2/3 de nos jours. Les faits sont sans équivoque, isoler par dessus est le bon réflexe. Tenons nous loin des méthodes empiriques et faisons confiance aux principaux intéressés : les industriels du béton !

 

Merci pour vos lectures et bon chantier.

Serge USTUN.