Les ombrières photovoltaïques se développent sur tous les parkings des supermarchés et c’est tant mieux. Propulsé en grande partie suite à la loi APER, le segment explose littéralement car l’ombrière offre plusieurs atouts pour les centres commerciaux, en plus de générer une énergie renouvelable et illimitée. Je suis allé visiter un chantier d’installation d’envergure et je vous livre mon retour de terrain.
Si le photovoltaïque peine encore à se développer chez le particulier, c’est littéralement l’explosion d’installations en ce qui concerne le tertiaire. Les parkings des centres commerciaux voient fleurir des ombrières photovoltaïques partout en France, et cette initiative n’est pas anodine. Ces immenses « carports » solaires sont de véritables usines à production d’énergie et offrent également un confort pour les clients : De l’ombre.
Certes, nous le savons tous, les arbres offraient un meilleur confort encore, mais ce temps n’est plus. Cela fait bien des années que je n’ai pas vu la nature s’inviter sur nos parkings alors tout est bon à prendre.
Les panneaux photovoltaïques pour ombrières
Sur ce dossier, ce ne sont pas moins de 5 travées sur portiques en galvanisé, qui sont composées de 7 panneaux au rampant sur 32 rangées. Faisons le calcul, c’est 224 panneaux par travée soit 1120 panneaux au total.
De quoi produire 450 Kwatts en crête !
Aucun mystère, les panneaux solaires utilisés pour réaliser les ombrières photovoltaïques sur le parking de ce supermarché sont « courants » (sans jeu de mots). Autrement dit, les modèles de panneaux des ombrières sont très exactement les mêmes que ceux que vous pourriez poser chez vous. Dans notre exemple, il semble que ce soient des panneaux de la marque Jinko, évidemment Chinoise. Selon le marché de travaux, la production de chaque panneau sera calculée pour répondre à la demande principale, il se peut donc que ces derniers soient choisis en fonction de la puissance recherchée.
Les onduleurs Huawei SUN 2000 / 110 Ktl / Triphasé
Les onduleurs utilisés pour ce chantier sont des Huawei SUN2000 de 110 Ktl. Ils sont au nombre de 5, soit un par travée. La connectique est impressionnante mais tout est parfaitement acheminé, la mise en oeuvre est exemplaire.
Les SUN 2000 110 Ktl, comme leur nom l’indique, permettent d’exploiter 110 Kw. La production totale en crête sur le site étant de 450 KwC, ça passe très largement. 4 onduleurs auraient d’ailleurs fait l’affaire car on sait qu’on ne sera jamais à 450 Kw de puissance réelle. Là, l’installateur s’est donc donné un peu de marge et de confort.
Pour rappel, nous sommes sur une installation en triphasé. Pour la marque, nous la connaissons bien et Huawei ne démérite jamais, surtout sur ces sujets.
Deux énormes tableaux de raccordement viennent sécuriser l’installation.
La structure en acier galvanisé pour maintenir les ombrières photovoltaïques
Au delà du massif impressionnant que constituent les panneaux photovoltaïques, c’est l’armature de maintien de ces cinq immenses carports qui étonne. Évidemment, ici on utilise la technique du portique dont j’ai déjà parlé par ailleurs, idéale pour ce type d’installations.
Ci-dessus : Détail de la structure porteuse en galvanisé pour maintient de l’ensemble des panneaux solaires. Crédit photo : S.USTUN / Google Pixel 9 PRO.
Les profilés en galvanisé sont impressionnants et pour cause, ils doivent supporter le poids d’une part, mais également les forces exercées par le vent. Vous noterez que chaque travée est reliée aux autres par des arbalétriers et chaque travée dispose de tirants en croix verticaux.
Une solution de portique bois aurait pu être envisagée ? C’est la question que nous nous poserons ultérieurement. Pour les particuliers l’enjeu est moindre et je vous renvoie vers mon article ci-dessous.
Lire mon article sur les carports photovoltaïques.
Le levage et l’installation des panneaux solaires
Concernant le levage, l’avantage d’œuvrer sur un parking existant est de pouvoir utiliser une simple nacelle. Nacelle ciseau ou à bras, les sols sont suffisamment plans et circulables pour permettre l’utilisation de machines de levage simple.
Ci-dessus : Raccordement des panneaux aux onduleurs. Crédit photo S.USTUN / Google Pixel 9 PRO.
Pour l’installation des panneaux, qui s’est déroulée très rapidement d’ailleurs, l’intervenant utilise une nacelle « ciseau ». Par la suite, pour les raccordement aux onduleurs et autres interventions, ce sera une nacelle simple à bras.
La récupération des eaux pluviales
Les eaux pluviales (EP) sont récupérées. On remarquera que le travail de zinguerie est correctement effectué. D’ailleurs, c’est plutôt discret et pour le coup, cela s’accomode très bien avec les structures porteuses en galvanisé.
On remarque « à peine » les descente d’EP et on ne voit littéralement pas les gouttières qui sont plus proches de chéneaux encaissés que de gouttières au sens littéral.
Bon boulot.
En retard ? Clairement mais ça avance
Nous sommes réellement en retard en France, concernant le développement du photovoltaïque. N’en déplaise à certains ministres qui clament haut et fort que nous sommes en bonne voie. Lors de mon voyage en Allemagne, j’ai pu constater un véritable « gap » entre nos deux pays. Nous avons encore du chemin à faire.
Lire mon article sur le photovoltaïque en Allemagne. Un fossé entre nos deux pays.
En ce qui concerne la loi APER, je vous propose qu’on fasse un tour d’horizon que nous développerons précisément dans un dossier dédié. On définit les contours de la loi :
Cette section sera soumise à vos compléments d’informations, contactez la rédaction pour apporter vos détails.
Loi APER : Décryptage de la loi photovoltaïque en France
La loi n° 2023‑175 du 10 mars 2023, dite APER, vise à simplifier, accélérer et massifier la production d’énergies renouvelables (EnR) en France, notamment le photovoltaïque.
Nous devons le texte au gouvernement Borne.
Contexte & enjeux
- La crise énergétique entre 2021–2023 (hausse des prix, incertitudes géopolitiques) a mis en évidence la dépendance française aux marchés énergétiques externes
- En 2022, la France plafonnait à environ 20 % d’EnR dans sa consommation, en retard par rapport à l’objectif européen de 23 %.
- La PPE (Programmation Pluriannuelle de l’Énergie) fixe l’enjeu : tripler la puissance photovoltaïque installée d’ici 2030 (objectif entre 54 et 60 GW, contre ~20 GW en 2020).
Principales mesures pour le photovoltaïque
Simplification administrative & planification locale
- Instauration de référents préfectoraux chargés de coordonner et accélérer les projets EnR.
- Création, d’ici novembre 2023, de Zones d’Accélération pour les EnR (ZAEnR), zones favorables aux projets avec procédures allégées : délais réduits, pas de comité de projet, bonus tarifaires, etc.
- La planification est territorialisée : communes, EPCI, services de l’État et CRE (Comité Régional Énergie) travaillent en concertation.
Obligation de solarisation des parkings
- Les parkings existants de ≥ 1 500 m² doivent être couverts à 50 % par des ombrières photovoltaïques.
- Dès 2026 pour les surfaces ≥ 10 000 m² (report possible à 2028 sous condition).
- 1er juillet 2028 pour les 1 500–10 000 m² / source : socotec.fr
- Sanctions financières en cas de non‑respect : 20 000 €/an (<10 000 m²) ou 40 000 €/an (≥ 10 000 m²).
- Objectif : valoriser les surfaces artificialisées, produire de l’électricité sans empiéter sur les terres agricoles.
Bâtiments non résidentiels : obligation solaire ou végétalisation
- Tous les bâtiments neufs non résidentiels > 500 m² (commerces, bureaux, écoles, hôpitaux, etc.) doivent intégrer une source d’EnR ou se végétaliser dès 2025 pour les neufs, et dès 2028 pour les existants.
- Cette mesure prolonge la loi Climat & Résilience, désormais étendue aux bâtiments anciens.
Lire mon article sur les toitures végétalisées.
Agrivoltaïsme : un cadre juridique dédié
La loi introduit un régime légal pour l’agrivoltaïsme (article 54), définissant des critères précis :
- L’activité agricole doit être principale ; la couverture photovoltaïque < 40 % ; installation réversible et compatible avec élevage ou cultures.
- Avantages : maintien des aides PAC, reconnaissance en zone agricole, insertion dans le PLU, etc.
- L’agrivoltaïsme combine production d’énergie et exploitation agricole, optimisant l’utilisation du foncier tout en respectant la biodiversité.
Sources : Agrivoltaïsme.fr / Engie-green.fr
Autres actions pour le solaire
- L’installation de panneaux est autorisée sur des terrains artificialisés : bordures d’autoroutes, friches industrielles, zones littorales par dérogation.
- Encouragement à l’autoconsommation collective, facilité par un cadre juridique rénové.
- Financement et partage de valeur : instruments comme CPE, concession, AMI, CPPA, PPA, primes à l’autoconsommation, tarifs garantis.
Financement & modèles économiques
- Contrat de Performance Énergétique (CPE) tiers-financé : un prestataire finance l’installation, mesurant des gains énergétiques.
- Concessions publiques : les collectivités délèguent conception, financement, exploitation à un tiers.
- Corporate PPA / CPPA : contrats long terme entre producteur et consommateur d’électricité renouvelable.
- Autoconsommation collective (ACC) : mutualisation localisée de l’énergie solaire (rayon ≦ 2 km), idéal pour les zones urbaines ou rurales.
Financement classique :
- Via emprunt bancaire, avec taux bonifiés.
- Auto‑financement par les entreprises, sans partenaires ni intérêts .
- Primes & tarifs : prime de 190 €/kWc ≤36 kWc ; 100 €/kWc ≤100 kWc ; tarifs de rachat garantis (ex : \~0,076–0,13 €/kWh selon puissance).
Controverses et limites : Ce qui ressort des discussions
Critiques environnementales :
- Certains dénoncent la destruction d’espaces naturels (plus de 100 000 ha touchés), appellent à privilégier les surfaces artificialisées.
- Évaluations environnementales parfois allégées dans les ZAEnR, au mépris de la biodiversité.
Ambition jugée insuffisante :
- Les associations (Greenpeace, CLER, élus) jugent la loi peu ambitieuse et manquant d’outils financiers ou territoriaux réellement efficaces.
- Les élus locaux regrettent la complexité des calendriers et procédures, ainsi que des délais jugés trop serrés .
Coûts pour l’État :
- La CRE prévoit que les mécanismes de soutien coûteront plusieurs milliards d’euros à l’État en 2024, notamment pour le solaire.
En conclusion / en marge des ombrières photovoltaïques
La loi APER constitue un tournant pour le photovoltaïque en France :
- Elle crée un cadre juridique et territorial solide via ZAEnR, référents, simplification administrative.
- Elle impose des obligations concrètes : solarisation des parkings, bâtiments, agrivoltaïsme.
- Elle propose divers modèles économiques adaptés à chaque profil (public, privé).
- Toutefois, elle n’échappe pas aux critiques : insuffisance écologique, coûts publics, lente mise en œuvre locale.
Pour les entreprises & collectivités :
- Cartographier les ZAEnR locales, programmer les travaux (2026–2028).
- Étudier le modèle financier le plus adapté (CPE, concession, PPA…).
- Vérifier les dérogations possibles (contraintes techniques, patrimoniales…).
- Impliquer riverains et collectivités dès la concertation.
Perspectives : Ça reste interessant
- Décrets et arrêtés d’application restent à suivre (les décrets agrivoltaïques : couverture ≤ 40 %, installation réversible, durée 40 ans renouvelable).
- Une adaptation post-2025-nouveau texte (loi de simplification) vient de modifier certains délais (par exemple sur les ombrières).
Je vous propose que nous revenions régulièrement sur le sujet, et que nous développions chaque détail de ce segment qui me semble réellement intéressant. Nous sommes sur un enjeu à ne pas rater pour les entreprises spécialisées.
Merci pour vos lectures, et bon chantier.
Serge USTUN.