La vibration du béton est souvent mal appréhendée, obligatoire pour les uns, facultative pour les autres. Un flou règne sur le sujet, que je me propose de rendre plus intelligible.
Chasser l’air, ni trop, ni trop peu. Je résumerai en ces termes.
La vibration du béton est une étape primordiale dans le processus de coulage du béton, essentielle pour garantir la qualité et la durabilité des structures. Plus un béton est dense, plus il est opaque. Il est par conséquent question de la solidité de l’ouvrage.
Dans ce sujet du jour, j’exprime l’importance de la vibration dans le domaine de la construction, ses méthodes et ses avantages.
L’importance de la vibration du béton
La vibration du béton vise à éliminer les bulles d’air emprisonnées et à compacter le matériau pour assurer une répartition uniforme du béton et une meilleure opacité de ce dernier.
Sans une vibration adéquate, le béton risque de présenter des défauts tels que des cavités, des fissures et une résistance réduite, compromettant ainsi la solidité de la structure.
Nous pouvons parler de « porosité » lorsqu’un béton n’est pas correctement vibré.
Ce dernier sera donc peu compact, plus léger et moins cohérent. Le fait de ne pas vibrer le béton apporte également un risque de défaut d’enrobage.
L’utilisation d’une aiguille vibrante (par exemple) va agiter le béton, chasser l’air, et rendre le mélange parfaitement homogène. Ce dernier ne présentera plus aucun signe de porosité et sera de facto plus résistant.
En revanche, une utilisation prolongée de l’aiguille, ou un mauvais positionnement de cette dernier peut engendrer un problème contre productif : La ségrégation du béton.
En introduction, j’écrivais « ni trop, ni trop peu« . L’un des grands défauts des jeunes maçons, est de « trop » vibrer le béton. Soit l’aiguille est laissée trop longtemps sur une même zone, soit, plus risqué encore, l’aiguille heurte l’armature en acier.
Dans ces deux cas, la vibration est contre productive.
Certains ouvrages nécessitent plus d’attention que d’autres. Il est légitime d’imaginer qu’un béton mal vibré peut engendrer de graves désordres sur un balcon en porte à faux par exemple. Cela peut conduire à de graves accidents (lire mon analyse sur les balcons d’Antibes).
Lire également mon article sur le dosage des bétons
Obligatoire ou non ?
Comme je l’évoque dans mon article sur le dosage du béton (lien ci-dessus), le vibrage du béton n’est pas nécessairement obligatoire selon la classe de béton en présence.
Pour rappel, les bétons se classent selon leur élasticité : S1 – S2 – S3 – S4 et S5.
Les bétons S5 sont dits « autoplaçants ». Ces derniers, très fluides, ne nécessitent pas de vibration.
En revanche, pour toutes les autres classes de béton, la vibration est censée être obligatoire. Je dis bien « censée », car dans les faits, peu de maçons vibrent leurs dalles, piliers et linteaux.
Le platoir (ou le simple tube à bras) pour fluidifier et tasser le béton est le plus souvent l’usage pour les dalles, les coups de marteaux sur le coffrage et/ou le « malaxage » avec un fer à béton pour les linteaux et piliers.
Par conséquent, peu de maçons sont réellement dans les règles de l’art en ce qui concerne la vibration. Fort heureusement, les bétons mélangés en usine sont de très bonne qualité, et compensent le manque de rigueur au coulage.
Une dalle (ou tout autre type d’ouvrage en béton) doit également être vibrée « dans les temps », soit pendant que le béton est encore frais.
Méthodes de vibration du béton
Il existe plusieurs méthodes de vibration utilisées dans l’industrie de la construction, notamment la vibration interne et la vibration externe.
La vibration interne, également appelée vibration à immersion, implique l’utilisation de vibrateurs immergés directement dans le béton frais.
Cette méthode est particulièrement efficace pour les structures de grande taille ou complexes.
D’autre part, la vibration externe consiste à appliquer des vibrations à la surface du coffrage à l’aide de vibrateurs externes.
Cette technique est souvent utilisée pour les éléments préfabriqués ou les dalles de béton où l’accès est limité.
- Aiguille vibrante
- Platoir vibrant
- Banches vibrantes
Ci-dessus : Utilisation d’une aiguille vibrante, usage extrêmement courant pour vibrer le béton : Source / Artisanbeton.be
L’aiguille vibrante :
L’aiguille vibrante est la méthode la plus courante, la plus ancienne également. Cette méthode est simple et peu coûteuse. D’ailleurs il n’est pas nécessaire d’acheter un aiguille, vous pouvez les louer chez n’importe quel locatier.
L’avantage de l’aiguille est multiple. En effet, l’aiguille permet une vibration du béton dans la profondeur (dans la masse). Ce que ne propose pas la règle vibrante. Cet avantage est également un risque. Il ne faut surtout pas « toucher » le ferraillage, sous peine de ségrégation du béton.
Enfin, un avantage unique de l’aiguille est de pouvoir vibrer le linteau et les piliers (ou les semelles coffrées), ce que la règle ne peut évidemment pas faire.
Pour une dizaine d’euros par jour, vous pourrez vibrer correctement votre béton.
La règle vibrante :
La règle vibrante permet une bonne vibration du béton, comme pour l’aiguille. En outre, cette dernière permet également de lisser et surfacer le support. Elle permet donc de faire d’une pierre deux coups. Voir la photo d’illustration dans le paragraphe suivant.
Attention cependant, la règle vibrante ne permet pas d’offrir une vibration en profondeur comme l’aiguille. Orientez vous sur une règle de bonne qualité qui diffuse suffisamment les vibrations pour éviter d’obtenir un mauvais béton.
Il est également possible de louer une règle vibrante chez un locatier.
Attention :
La règle vibrante ne vous permettra pas de vibrer les semelles, les linteaux et les piliers. Elle ne remplace donc pas l’aiguille. En revanche, l’avantage de la règle est de ne pas risquer les chocs de vibration sur l’armature (treillis).
Les banches vibrantes :
Les grandes entreprises de construction sont équipées de coffrages vibrants. Cette technique est d’une excellente efficacité, et présente de nombreux avantages.
Les banches vibrent de façon parfaitement programmée, et avec la juste force. Cela permet d’obtenir un béton parfaitement homogène et surtout, des surfaces parfaitement lisses au décoffrage.
Cette méthode nécessite de lourds et coûteux systèmes de coffrages, c’est sont principal défaut.
Eviter la ségrégation du béton
Il est nécessaire de vibrer le béton, nous l’avons vu tout au long de l’article. En revanche, il s’agit de ne pas trop le secouer non plus. Le béton est un matériau très technique qui nécessite énormément de facteurs de vigilance différents : Teneur en eau, température, teneur en ciment, qualité des agrégats et même, la hauteur de chute (au coulage).
Trop le vibrer, présente le risque de générer une ségrégation du béton. C’est un réel danger car cela revient à séparer les agrégats du liant. En d’autre terme, cela devient une forme de « désactivé ».
Dans cette situation, comme pour son opposé, le béton n’est plus structurellement efficace.
Ci-dessus : Utilisation d’une règle vibrante (ou platoir vibrant) pour lisser et vibrer le béton. Source : Betonix.be
Avantages de la vibration du béton
La vibration du béton offre de nombreux avantages, notamment l’amélioration de la résistance et de la durabilité du matériau.
En éliminant les vides d’air, la vibration permet d’obtenir une densité accrue du béton, ce qui se traduit par une meilleure résistance à la compression et une diminution de la porosité.
Lorsque vous utilisez une aiguille vibrante, vous le voyez immédiatement dès que vous sortez l’aiguille. Le béton perd de sa hauteur. C’est bon signe, cela signifie que l’air est chassé.
De plus, une meilleure compaction réduit les risques de retrait et de fissuration, assurant ainsi une plus grande longévité des structures.
- Augmentation de la résistance à la traction, à la compression et à la flexion
- Meilleur enrobage des acier de chainage ou d’armature
- Augmentation de l’étanchéité du support coulé
- Densité plus importante (solidité améliorée)
Technologies innovantes en après sinistre
Avec les avancées technologiques, de nouvelles techniques de vibration émergent pour améliorer les expertises en après sinistre. J’évoque assez régulièrement le scléromètre, très largement utilisé par les experts et les bureaux de contrôles.
Parmi les plus récentes méthode de contrôles, on trouve l’investigation de la ségrégation à haute fréquence ou « ultrasons ».
Cette méthode est donc : Non destructive.
Conclusion
En conclusion, la vibration du béton est un processus essentiel dans la construction de structures solides et durables.
En garantissant une compaction adéquate du matériau, elle contribue à améliorer sa résistance, sa durabilité et sa qualité globale.
Avec l’évolution des techniques et des technologies, la vibration du béton continue de jouer un rôle crucial dans l’industrie de la construction, assurant ainsi la pérennité des infrastructures modernes.
Connaître les termes évoqués dans cet article permet de mieux situer les désordres, et de les nommer. Pour le domaine de l’expertise bâtiment ce sont des notions indispensables.
Pour le maçon, il est question de risque, et de responsabilité qui peut éviter une action en décennale ou en dommages-ouvrage.
Merci pour vos lectures et bon chantier
Serge USTUN.