Joint de rupture ou joint parasismique ? Ce n’est pas tout à fait la même chose, et il n’est pas rare de faire l’amalgame.
Un joint de rupture concerne la prévention d’un tassement différentiel de deux bâtiments dont la hauteur est différente au sein d’une même propriété. C’est la descente de charge.
Quant au joint parasismique il veille à rendre possible le mouvement d’un bâtiment qui subit une contrainte sismique par rapport aux autres bâtiments qu’il adosse.
Je rédige cet article car bien souvent les deux termes ne sont pas acquis, ou correctement appréhendés et nos chers lecteurs qui tapent « Joint entre deux maisons » ou « séparation entre deux maisons » se retrouvent avec des résultats concernant les zones de non aedificandi ou de limites de constructions.
Or il est bien question ici de « vide » entre deux bâtiments, d’une même maison ou de deux maisons distinctes.
Revenons en détail sur ces deux types de joints que sont:
- Le joint de rupture
- Le joint parasismique
Joint de rupture: Définition
Je reprends la définition du joint de rupture aux éditions Eyrolles car elle est juste:
« Joint permettant les déplacements verticaux dus à des tassements différentiels sous les fondations (entre deux bâtiments de hauteurs inégales par ex.). » Cette définition est la plus précise concernant les joints de ruptures souvent confondus avec les joints de fractionnement ou de dilatation. En d’autres termes, lorsqu’il s’agit de bâtir des ouvrages dont les descentes de charges seront plus importantes par endroit il convient de créer un joint de rupture. Ce qui impose des conditions de mise en œuvre et de coût non négligeables.
Exemple type d’un joint de rupture:
Pour exemple, je vous propose une maison de constructeur avec un étage (R+1) et un garage en plain pied adossé.
Sur la photo ci-dessus, lors de la construction d’une maison neuve en brique, vous notez que le garage est totalement désolidarisé du logement principal, permettant des descentes de charges différentes sur les fondations.
Le rez-de-chaussée de la maison ainsi que son étage vont « peser » sur les fondations à raison du poids des matériaux qui la constitue. Soit:
- 2 niveaux de parpaings ou de brique (qui pèse immédiatement sur les fondations)
- dalle intermédiaire béton et charges d’exploitation (dont la charge se répartie puis exerce une force sur les fondations)
- charpente
Le garage quant à lui ne pèsera que du poids de son élévation propre, soit plus 50% de masse en moins.
- 1 niveau de parpaings ou de brique
- charpente
Conséquences sur l’ouvrage:
Par conséquent, les fondations ne vont pas reprendre la même masse en tout point répartie de manière homogène mais vont être plus « écrasées » sous l’emprise des étages que sous le garage. Il y aura fissuration et désordre tôt ou tard, surtout si le terrain n’est pas suffisamment dense.
Dans le cas de terrains argileux ou marneux les fissurations et les désordres apparaitrons en quelques années, voir quelques mois.
Le joint de rupture va permettre d’uniformiser la descente de charge sur la maison et son étage (voir photo ci-dessus), et uniformément sur le garage qui dès lors est dissocié.
Cela implique par conséquent que les deux « bâtis » ne soient pas solidaires, on parle donc de joint de rupture, autrement dit: Du vide entre les deux bâtiments.
En l’occurrence, le mur porteur de la maison principale ne sera pas collaborant avec celui du garage. Le garage aura ses propres murs porteurs, ce qui engendre évidemment un cout supplémentaire.
Lire mon article sur les causes de fissurations.
Joint parasismique: Définition
Contrairement au joint de rupture qui nous l’avons vu, concerne directement la « descente de charge », le joint parasismique concerne le mouvement du bâtiment soumis à un stress sismique. En d’autres termes, cela ne concerne pas les forces exercées de haut vers le bas, mais plutôt de droite à gauche ou inversement. Les mouvements de travail latéraux.
Autre élément singulier à noter, le joint parasismique concerne généralement deux propriétés distinctes (deux maisons côte à côte) alors que le joint de rupture concerne plus précisément une même maison.
Ce sont les Eurocodes 8 qui définissent les règles de mise en œuvre d’un joint parasismique. Certains usages semblent ressortir communément, comme l’épaisseur du joint de 4 centimètres (selon la zone il peut aller jusque 6 centimètres) et la notion de « vide ».
En effet, pour que le joint parasismique soit efficace il doit permettre le mouvement du bâti, donc il doit être vide de tout matériaux ! Oubliez donc les dalles de mousse PU. Le vide de construction doit être strict.
Le seul but du joint parasismique est, vous l’aurez compris, de laisser le bâtiment bouger dans son horizontalité alors que le but du joint de rupture consiste à le laisser bouger dans sa verticalité.
Il est ici question du fameux « joint entre deux maisons » que personne n’arrive clairement à définir dans les recherches internet. Vous le saurez, il s’appelle « joint parasismique ».
Ci-dessus en photo, le mur porteur adossé avec un joint creux normatif (environ 4 à 6 centimètres de vide) entre les deux maisons, il s’agit du même mur que la photo précédente avant les élévations.
En bref: « Joint » & « joint »
Pour être plus pragmatique nous pouvons « tailler » les grandes lignes et différences entre joint de rupture et joint parasismique:
Le joint de rupture:
- Mouvements verticaux,
- concerne la descente de charge,
- sur une même propriété (au sens de fondation)
- n’est généralement pas en limite de propriété bien au contraire
- ne se détermina pas par la zone géographique, il est valable en tous lieux.
Le joint parasismique:
- Mouvements horizontaux,
- ne concerne pas la descente de charge,
- généralement pour séparer deux propriétés distinctes
- a fortiori en limite de propriété
- se détermine par la zone géographique (zone sismique).
Joint de rupture: La différence avec un joint de dilatation
Le joint de rupture n’est pas un joint de dilatation. Un joint de dilatation concerne un ouvrage « en élévation » ou « en plan » reposant sur une même fondation et dont la hauteur ou le poids n’est pas différenciant. Il est question ici de « prévoir » l’apparition de fissures dues au mouvement structurel des matériaux dits « naturels ». Il n’est pas ici question de masse, mais de cohésion des matériaux sur de grandes surfaces. Cela concerne:
- les dalles,
- les chapes,
- les enduits de façades,
- le parquet parfois
Bien souvent on crée le joint de dilatation « après » la mise en œuvre. Soit par sciage, soit par meulage, etc. Il est tout à fait possible de prévoir avec exactitude où vont fissurer les matériaux. En cause évidement, les trop grandes surfaces d’un seul tenant. Les grandes dalles que vous voyez dans les grandes surfaces bien lisses et bien planes sont « sciées » après coulage.
Il en est de même pour les piliers « pris » dans la dalle, vous verrez souvent des joints creux de scie en diagonales qui partent des angles des piliers. Cela évite une fissuration désordonnée et disgracieuse.
Pour les façades il n’est pas rare de voir des profilés en PVC séparant une même façade d’un immeuble. Cela permet de minimiser le risque de fissuration.
Voir également sur le même sujet: Définition du joint de rupture selon Infociments.fr
Merci pour vos lectures et bon chantier !
Crédits photos: Serge USTUN