Lame d’air isolation : Une vide technique et de nombreuses idées reçues !
Il est difficile de chasser les idées préconçues, surtout lorsqu’elles n’ont aucun fondement technique, comme c’est le cas pour la lame d’air en isolation. Il se dit tout et rien à ce sujet depuis des décennies au point de rendre complexe ce qui de prime abords est simple : La lame d’air en isolation est inutile dans 90 % des cas.
Dans cet article, je vous propose une démonstration technique et règlementaire sur le sujet de la lame d’air, à destination des particuliers mais également de mes confrères, professionnels du bâtiment.
Lame d’air isolation : Optimisez la performance énergétique de votre bâtiment
Idée reçue numéro 1 :
« La lame d’air représente une solution efficace pour l’isolation. Elle améliore nettement la performance énergétique des bâtiments. Cette technique, simple mais innovante, s’adapte à diverses structures. Mur en pierre ou mur isolé, elle offre une réponse pertinente à l’enjeu d’efficacité énergétique. Une lame d’air en isolation est une valeur ajoutée considérable. »
Voilà le type de définition que l’on trouve aisément sur internet, lors d’une recherche sur la lame d’air en isolation. Cette assertion n’a aucun fondement technique.
Les seules lames d’air utilisées comme isolant sont celles qui remplissent le double ou triple vitrage de nos fenêtres et portes fenêtres. Or, à l’exception de la haute montagne, ces lames d’air sont en réalité du gaz.
Une lame d’air permet la ventilation, en aucun cas l’isolation.
Idée reçue numéro 2 :
« La lame d’air est obligatoire pour une isolation des murs intérieurs. Il faut laisser de l’air entre l’isolant et le mur. Cette lame d’air permettra de laisser respirer le mur et préviendra des risques d’apparition d’humidité sur les doublages. »
Une idée reçue qui fait son chemin, encore de nos jours, et qui n’a clairement aucun sens : Laisser les murs respirer avec une lame d’air.
Le DTU 20.1 donne les instructions techniques et les préconisations d’utilisation d’une lame d’air en matière d’isolation par l’intérieur. Le texte ne vise précisemment que deux cas de figures distincts:
- Doublage des murs poreux, montés en pierres, liés à la chaux (bâti ancien)
- Murs exposés aux forts battement de pluie, maisons en bord de mer (au sens strict)
Cette règle impose une lame d’air de 2 centimètres effectuée à l’aide de tasseaux d’épaisseur, uniquement dans les deux cas précis évoqués plus haut. Imposer une lame d’air dans une maison montée en parpaings ou en murs banchés est un non sens absolu.
La grande majorité des maisons sont doublées en plaques de plâtre isolées avec du polystyrène collé, sans aucune lame d’air entre l’isolant et le mur.
Pour l’immense majorité des constructions de moins de 40 ans, le « placo » collé avec du polystyrène est donc une preuve indéniable que la lame d’air n’est pas obligatoire, loin sans faut.
Les maisons construites et doublées avec les systèmes sur fourrures et appuis présentent la même caractéristique: L’isolant est toujours en contact avec les murs.
La seule lame d’air obligatoire concerne les bardages bois. Cela ne rentre évidemment pas dans le cadre d’une quelconque amélioration de l’isolation (DTU 41.2).
En bref : La lame d’air pour l’isolation
Il faut être pragmatique, la lame d’air n’est absolument pas obligatoire dans 95 % des cas de figure. Cette dernière n’améliore pas l’isolation (en tout cas pour deux centimètres d’épaisseur) et ne sert à rien pour permettre aux murs de respirer. Les deux précédentes idées reçues sont donc fausses.
Vous n’avez pas besoin de lame d’air si vos murs sont en appareillage régulier, liés au mortier ou à la colle comme :
- Murs en parpaings (agglo, moellons)
- Murs en SIPOREX
- Murs montés en briques creuses
- Murs banchés au béton
Dans le cas d’une construction bois, notamment les ossatures bois, le principe est le même. Les lames d’air ne servent qu’à passer les flux, ce sont des vides techniques. Seuls les bardages extérieurs nécessitent une aération constante.
Lire mon article sur la lame d’air obligatoire pour la pose d’un bardage
Dans le cas contraire, il convient de poser un pare-vapeur afin de stopper la condensation, or, la quasi totalité des maisons à ossature bois sont de facto construites avec un pare-vapeur.
Une lame d’air n’isole que si l’air est inerte, autrement dit, jamais.
Confusion avec la valorisation de la lame d’air
Pour être tout à fait précis, il est assez courant de faire la confusion entre la notion de « laisser une lame d’air » et la notion de « valorisation thermique de la lame d’air ».
Cette dernière notion est mesurable, c’est une donnée technique qui intègre le calcul de résistance thermique d’un isolant. Le terme de « lame » apporte la confusion.
Il s’agit de l’épaisseur totale de l’air « piégé » au sein même d’un isolant, c’est à dire non séparé de l’isolant et totalement inerte. Les trous d’air en somme.
Pour vous proposer un exemple, avec une donnée technique issue d’un isolant très courant en laine minérale, cette donnée est en théorie clairement mentionnée sur la fiche produit (voir photo ci-dessous) : (source du lien – Knauf industrie)
Comment mettre en œuvre une lame d’air pour l’isolation intérieure ?
Maintenant que le sujet est clarifié concernant les cas les plus fréquents, où la lame d’air est inutile, examinons ensemble la méthode de doublage lorsqu’elle est nécessaire.
Le DTU 20.1 propose une solution sur la base de tasseaux de deux centimètres d’épaisseur. Cette solution est viable, si vos murs sont parfaitement plans et correctement appareillés.
Cela ne concerne donc qu’un seul cas de figure : Le front de mer.
La lame d’air ne joue pas un rôle d’isolation mais de ventilation du support
Dans ce cas précis, il est facile d’imaginer la pose de tasseaux avec un choix d’entraxes qui permettra à l’isolant de ne pas se « coller » au mur. Or, cette technique est clairement inefficace, au premier coup d’œil pour les professionnels du bâtiment qui ont déjà isolé un mur.
L’isolant en laine minérale (laine de verre, laine de roche) « gonfle » dès qu’il est déroulé. Ce ne sont pas les deux centimètres laissés par les tasseaux qui vont éviter le gonflement. Cette technique n’est donc valable que dans un unique cas :
L’utilisation de laine rigide (ou d’un isolant autre que la laine, rigide également).
La solution la plus adaptée est donc la création d’une ossature placostyl, sur montants dos à dos et rails. Ainsi, il est possible de décaler totalement l’ossature par rapport au murs périphériques et de fait, laisser une lame d’air. Il faudra alors simplement glisser l’isolant qui sera tenu par les montants et ne viendra pas coller le mur. C’est l’unique solution efficace dans ce cas.
Pour les murs en pierres, liés au mortier de chaux ou le pisé par exemple, cette méthode est tout aussi efficace. Elle permet, en plus de créer une lame d’air, de « dresser » des murs parfois peu homogènes.
Dans le cas de l’isolation d’un mur brique
La lame d’air pour l’isolation d’un mur brique répond aux mêmes caractéristiques que pour un mur en parpaing. Beaucoup de constructeurs adoptent la brique de construction pour réaliser les maisons courantes. La brique étant un matériau légèrement plus isolant que le parpaing, cette dernière a le vent en poupe.
Dans ce cas, encore une fois, la lame d’air ne présente aucun intérêt technique. Elle n’apporte aucun confort, ni amélioration des performances énergétiques. La brique de construction n’oblige en rien la création d’une lame de ventilation.
Le cas peut éventuellement se présenter sur les anciennes maisons et immeubles, dont les contres cloisons étaient en briques creuses. La brique « plâtrière » de 5 centimètres d’épaisseur, qui faisaient office de doublage, était souvent ventilée par des petites grilles d’aérations basses et hautes.
Ces aérations servaient à ventiler la laine minérale qui était prise en sandwich entre la brique et le mur. Ce n’est plus d’actualité aujourd’hui. Sur ces typologies de murs, les « pares vapeur » n’existaient pas, il s’agissaient donc de limiter l’humidité emprisonnée dans la laine minérale.
Aujourd’hui les isolants courants en laine minérale, type GR32 par exemple, sont justement dimensionnés (perméabilité MU 1 à la vapeur) pour ne pas avoir à créer de lame d’air.
Lame d’air et isolation : Les cas particuliers
Une lame d’air ne peut en aucun cas jouer un rôle d’isolation. L’air est très certainement le meilleurs isolant, cependant il lui manque la « masse » pour obtenir une résistance thermique. En outre, pour qu’une lame d’air soit isolante, elle doit être strictement inerte. L’exemple de cas typique concerne nos fenêtres et portes fenêtres.
Cependant, il existe des cas dans lesquels la lame d’air permet « éviter » les problèmes dus à une isolation. Le cas d’une isolation sous bac acier en est le parfait exemple.
Lire mon article sur l’apport d’une isolation sous bac acier
Ici, la lame d’air sert de tampon contre la condensation générée par le bac acier.
L’efficacité d’une lame d’air entre deux isolants minces n’a toujours pas été prouvée. C’est un des autres cas de figure qui sont régulièrement évoqués.
En conclusion:
Pour conclure sur une note rassurante, n’hésitez pas à isoler vos maisons, lame d’air ou non. Le sujet de la lame d’air en isolation revient chaque année, et je reviendrai dessus chaque fois que nécessaire. Si votre maison n’est ni en pierre, ni en pisé, dormez sur vos deux oreilles, la lame d’air ne vous sert absolument à rien.
Vos murs ne risquent rien.
Pour aller plus loin, vous pouvez lire cette synthèse éditée par ISOVER sur l’étanchéité à l’air des bâtiments. Le texte traite également du sujet de la lame d’air.
Merci pour vos lectures et bon chantier.
Serge USTUN
Bonjour.
Cet article met fin à beaucoup de questionnement concernant cette fameuse lame d air. Cependant
,j en ai encore une.
Quand vous dites brique , c est également les briques rouges pleines ,région Nord pas de Calais?.je dois isoler sur un mur de 32 cm en brique rouge pleine. Dois je laisser cette fameuse lame d air.
Merci pour votre réponse.
Bonne journée
Bonjour Max
Merci pour ce retour.
Non en effet, la brique pleine ne nécessite aucune lame d’air en particulier comme pour l’agglo. Je remarque que j’aurai pu ajouter la brique pleine dans l’article, c’est un oubli de ma part.
Le site Placo France par exemple donne clairement la possibilité de coller le PSE (isolant polystyrène) directement à même les murs intérieurs sur la brique pleine (exemple d’une maison de 1900).
C’est donc la même chose que pour le reste : Pas besoin de lame d’air pour la brique pleine.
Merci à vous
Amitiés
Serge
Bonjour, merci pour cet éclaircissement,
Dans le cas d un mur pierre terre humide par capillarité, que conseilleriez vous?
Vide technique non ventilé risque d odeurs par la suite
Vide technique ventilé dehors, risque de point de rose à l intérieur.
Vide technique ventilé dedans apport de chaleur et développement de champignons
Vous me semblez calé sur le sujet votre avis m intéresserait beaucoup
Merci
Bonjour Arnaudeau,
C’est une excellente question, il faudrait gratter un peu le sujet et voir s’ il est possible d’apporter une correction au préalable au problème de remontée capillaire.
Dans ces cas, en général, rien ne marche (sauf à stopper l’humidité en amont).
Le cas échéant, sur cette typologie, je m’orienterai d’abord sur un gifflage (gobetis à la truelle) à la chaux, voir un mélange avec du chanvre et voir comment se comporte le support. Attention c’est du boulot (faut curer les joints et les réhourdir)
Après je sonderai avec un thmètre à intervalles réguliers pour savoir si la chaux stabilise le mur. Ca permettrait d’envisager une seconde étape en isolation avec plus de latitude.
J’ai eu le problème 2 fois, et sincèrement…. C’est jamais très bon.
Vous pouvez me faire passer une photo intérieure et une extérieure ?
Bonjour
Merci pour votre article très intéressant. j’ai une maison sur sous sol semi enterré pierre extérieur et ciment intérieur , vraiment pas terrible d’après ce que j’ai compris . j’ai tout nettoyé propre , mis un hydrofuge sur mes pierres et joints ,les murs intérieur sont désormais sain et je me posais la question de la lame d’air pour mon cas de figure! la rénovation c’est pas simple !
bonne journée cordialement
Salut Yanng,
Si le produit hydrofuge fonctionne c’est déjà bien. Il existe des petits THmetres aps très chers (12 euros). Faudrait tester. Ensuite, dans ces cas de murs enterrés on risque de créer de la condensation donc il faut réfléchir sur le pare vapeur plutôt que sur l’humidité entrante, si cette dernière est stoppée. Quoi qu’il arrive, dans ce cas une lame d’air peut tout à fait être pertinente si elle est ventilée. Sinon elle ne servira malheureusement a rien.