Les adjuvants pour béton permettent de réaliser des mises en œuvre par temps froid, par temps chaud, ou pour des contraintes particulières. Vous coulez en plein hiver ? Les fouilles sont inaccessibles à la goulotte ? Vous devez réaliser un plancher technique ?
Il y a autant de cas particuliers (en terme de coulage du béton) qui nécessitent des adjuvants adaptés : C’est magique certes, mais cela reste de la chimie de pointe.
Il existe 9 grandes familles d’adjuvants :
- Adjuvants hydrofuges.
- Retardateurs de prise.
- Accélérateurs de prise.
- Plastifiants (fluidifiants).
- Anti retrait.
- Désactivant.
- Curateurs.
- Aérateurs de bétons (entraineurs d’air).
- Colorants (bétons décoratifs).
Je vous propose que nous les passions en revue dans cet article.
Avant propos
L’adjuvantation du béton n’est pas un exercice de style. Il en va de la pérennité de l’ouvrage et par conséquent, l’enjeu est tout sauf à prendre à la légère. Depuis quelques décennies, les cimentiers maîtrisent parfaitement les formulations « spéciales » du béton, et les produits d’ajouts sont désormais accessibles au plus grand nombre.
Clairement, cela nous facilite la vie ! NdlR.
De la plasticité du béton à sa résistance à la compression définitive, les raisons d’utiliser les adjuvants sont nombreuses mais ces derniers ne doivent pas être sur estimés : Par exemple, un adjuvant hydrofuge ne remplace pas une étanchéité, et un durcisseur ne dispense pas d’un bon dosage en ciment.
Pour faire suite à mon dossier précédent, dans lequel j’explique l’importance d’un bon mélange pour obtenir les caractéristiques d’un béton de structure, je vous propose aujourd’hui de nous pencher sur le cas des adjuvants.
En cas de doute (ou de besoin particulier), je vous invite évidemment à lire le présent article, mais également à vous rapprocher d’une centrale à béton qui puisse vous fournir le bon béton, les bons adjuvants et surtout : Les bons dosages !
Cet article vient en complément de mon article sur le dosage du béton.
Comprendre les notions de dosage avant d’ajouter un adjuvant béton
Comme évoqué plus haut, vous devez lire mon article sur le dosage du béton, pour pleinement appréhender le sujet des adjuvants. Le lien est cliquable ci-dessus. Ce sont deux sujets étroitement liés.
Les adjuvants entrent dans la formulation du béton. Par conséquent, ils en modifient la substance et par extension, les propriétés.
Ne prenez donc pas ces indications à la légère et reportez vous aux données des industriels.
Adjuvanter un béton modifie donc sa structure et sa durabilité, s’il est mal dosé. C’est une précaution essentielle pour garantir la qualité, la résistance et la durabilité d’une structure.
Un dosage correct assure non seulement que le béton supporte les charges prévues (descente de charge, cisaillement etc.), mais qu’il résiste également aux conditions climatiques et aux contraintes environnementales.
Au-delà de la composition classique (ciment, eau, sable, gravier), les adjuvants sont devenus des éléments incontournables pour améliorer les performances du béton ou le rendre apte à des conditions particulières. Ils permettent d’optimiser les propriétés du mélange sans forcément augmenter la quantité des matériaux de base.
- Rendre un béton plus fluide (autoplaçant, béton S4 et S5).
- Eviter le faïençage lorsqu’une dalle sera laissée « brute » de surfaçage (garages automobiles, terrasses extérieures, espaces publics etc.).
- Permettre un coulage dans des espaces contraints : Coulage du béton à la goulotte en tranchées éloignées.
- Faciliter le décoffrage d’ouvrages spécifiques : Pilotis béton, escalier précontraints, etc.
- Accélérer ou retarder la prise du béton : Contraintes en été et en hiver.
- Donner au béton un rôle structurel & décoratif : Bétons désactivés, colorés, terrasses, trottoirs, etc.
- Adapter le béton aux urgences climatiques : Le béton drainant, par exemple.
Il faut donc nécessairement comprendre comment l’intégration des adjuvants béton impacte le comportement de ce dernier lors de la mise en œuvre.
Enfin, sachez que les adjuvants répondent également à des normes strictes, et doivent être marqués CE et NF.
Qu’est-ce qu’un adjuvant et pourquoi l’utiliser ?
Je vais reprendre la définition de Sika que je trouve parfaitement bien formulée :
« Les adjuvants sont incorporés au malaxage du béton ou du mortier […]. Ils améliorent la qualité du béton à l’état frais et durci, facilitent la mise en œuvre, augmentent la durabilité du matériau et permettent d’apporter des solutions à différents types de cahier des charges techniques. »
Les adjuvants sont des produits chimiques ou minéraux ajoutés en petite quantité au béton pour modifier certaines de ses propriétés. Un adjuvant pour béton est généralement ajouté à la formulation, en pleine « masse » (au cœur du mélange), pendant le malaxage.
Les ajouts représentent de 0,5 % à 2 % du mélange en proportion « ciment » et non en proportion du volume total de béton produit. Leurs effets peuvent être déterminants pour atteindre des caractéristiques spécifiques voulues : Fluidité, prise rapide, retardateur de prise, etc.
Pourquoi utiliser des adjuvants ?
Parce qu’ils permettent de :
- Améliorer la maniabilité : Faciliter la mise en œuvre du béton.
- Réduire la quantité d’eau : Augmenter la résistance finale du béton.
- Modifier le temps de prise : Accélérer ou ralentir le durcissement selon les besoins du chantier.
- Améliorer la durabilité : Accroître la résistance aux conditions extrêmes, comme le gel-dégel ou l’exposition à des environnements chimiques agressifs.
Consulter le dossier CEMEX sur les adjuvants béton.
Les principaux types d’adjuvants béton et leurs rôles
Pour les petites histoires, parfois amusantes, sachez que les époques ont changées et que couler du béton aujourd’hui, est bien plus amusant que lorsque j’ai débuté dans le bâtiment. Et ce, grâce aux adjuvants.
Juste en parenthèse, lorsque j’étais un jeune bonhomme du bâtiment, nous mettions de la paille sur les dalles fraichement coulées par exemple, en hiver. Ou bien nous passions nos journées avec l’aiguille vibrante à faire 10 centimètres carrés de l’heure (je grossis le trait).
Et bien les adjuvants ont supprimés toutes ses contraintes.
Les plastifiants et superplastifiants
Les plastifiants augmentent la fluidité du béton sans ajouter d’eau supplémentaire. On utilise également le terme de « fluidifiant ».
Les superplastifiants vont encore plus loin en réduisant drastiquement la quantité d’eau nécessaire tout en maintenant une excellente maniabilité.
Cela permet d’augmenter la résistance du béton à la compression tout en diminuant la quantité d’eau nécessaire au mélange.
Certains fluidifiants permettent de passer d’un béton S2 à un béton S4 dans modification de la durabilité de ce dernier. Je vous renvoie à mon article sur le dosage du béton pour appréhender les catégories de plasticité du béton.
Les domaines d’usages des plastifiants sont nombreux :
- Dalles et planchers techniques : Pour réalisation des vides sanitaires par exemple, ou des planchers chauffants dans la table de compression.
- Chapes autonivelantes.
- Rendu « lisse » pour les ouvrages verticaux (murs modernes laissés « bruts » après décoffrage).
- Amélioration du voile pour les ouvrages verticaux (solidité, rigidité, contrainte aux efforts).
- Sécurité d’avoir un enrobage parfait : Pour la réalisation des pilotis béton ou des jambages armés.
Les accélérateurs de prise
Utilisés pour réduire le temps de prise du béton, les accélérateurs sont essentiels pour les travaux en hiver ou lorsqu’il est nécessaire de décoffrer rapidement.
On parle de durcissement (MPa) au « jeune âge ». Pour exemple, il est possible d’atteindre 22 MPa à 2 jours seulement selon les produits.
L’impact sur le mélange concerne surtout la réduction du temps nécessaire pour que le béton atteigne sa résistance initiale, ce qui nécessite parfois des ajustements dans la composition globale.
Ces adjuvants concernent également les industriels qui produisent des ouvrages en béton précontraint (SEAC, KP1, etc.).
En ce qui nous concerne, on utilisera plus volontiers les retardateurs de prise qui ont un usage plus concret sur le terrain. Ce sont plutôt les entreprises de TP qui utilisent les accélérateurs de prise pour leurs chantiers de grandes envergures => C’est une question d’optimisation.
- Consulter la fiche explicative chez SIKA.
- Voir une fiche produit type / Gamme ULTIBAT.
Les retardateurs de prise
=> Lien vers les retardateurs béton chez SIKA.
Lorsque j’ai débuté dans le bâtiment, il était d’usage de passer sa journée à vaporiser délicatement une dalle fraichement coulée en été, en cas de fortes chaleurs. C’était le bon temps ? Pas vraiment.
Cela peut paraître incongru, mais cela jouait le rôle de retardateur de prise et (plus ou moins) d’anti-fissuration.
Aujourd’hui, il est inconcevable d’utiliser cette méthode, et c’est tant mieux.
Contrairement aux accélérateurs, les retardateurs ralentissent le durcissement du béton. Cela est particulièrement utile par temps chaud ou pour de grandes coulées continues. Cependant, un « rajout » excessif peut affaiblir le béton, d’où l’importance d’un contrôle strict de la quantité utilisée.
Les entraîneurs d’air
Ces adjuvants introduisent des microbulles d’air dans le béton, ce qui améliore sa résistance aux cycles de gel-dégel. Ces bétons permettent également de mieux résister à l’action du sel (lors des déneigements).
Cependant, chaque pourcentage d’air ajouté réduit la résistance à la compression, nécessitant un ajustement précis de la formulation en ciment pour compenser cette perte.
Lire mon article sur les bétons drainants.
Les adjuvants imperméabilisants / hydrofuges
Les adjuvants hydrofuges visent à réduire la perméabilité du béton, le rendant plus résistant à l’eau et à l’humidité. Ils peuvent modifier la texture et la consistance du mélange, ce qui implique une adaptation à la mise en œuvre en fonction du projet.
Ces types d’adjuvants ne font pas l’étanchéité. Ils sont souvent utilisés pour des ouvrages fortement soumis au ruissellement, ou lors d’ouvrages en bord de mer.
Attention, en aucun cas les adjuvants béton hydrofuges ne remplacent une étanchéité. Ils n’ont pas cette vocation. Ces derniers renforcent simplement les bétons qui sont fortement soumis aux ruissellements, ou bien encore à l’eau de mer.
En d’autres termes, une adjuvant hydrofuge ne vous dispense pas de réaliser une étanchéité bitumée ou la pose d’un EPDM sur des ouvrages nécessitant d’être « hors d’eau ». Dans une certaine mesure, cela peut se concevoir pour la réalisation des bassins extérieurs, ou des murets en périphérie des ruisseaux.
Lire mon article sur l’étanchéité des toitures terrasses, souvent réalisées en dalles béton.
Les anti retrait / anti fissuration
Les adjuvants béton de type « anti retrait » sont très courants. Ils sont notamment très utiles dans deux cas :
- Eviter le faïençage des dalles lorsqu’elles sont laissées « nues ».
- Permettre un coulage de surface plus important avec moins de joints de fractionnement.
Ce type d’adjuvant est très utilisé.
C’est un incontournable pour les maçons. Ici, il est question à la fois d’esthétique définitive et d’optimisation en terme de temps. Le faïençage n’étant pas une pathologie (structurelle), il est véritablement question d’obtenir un produit « fini » qui ne recevra pas de revêtement complémentaire.
Réduire les joints de fractionnement peut également apporter un gros bonus en terme de temps de mise en œuvre (pas besoin de fractionner, pas besoin de scier).
- => esthétique.
- => gain de temps.
Le désactivant pour béton
Le désactivant est à la fois un adjuvant (produit ajouté) et une « technique ». Ce n’est pas parce que vous ajoutez un produit désactivant que vous obtiendrez le résultat escompté !
Inutile de le présenter, le béton désactivé est « de loin » le type de finition des bétons de circulation les plus usités en France. Globalement, le désactivé est présent partout, sur les trottoirs, les dallages, les allées, et même les terrasses chez le particulier.
La méthode est très singulière pour couler un béton désactivé et il faut un minimum de savoir faire. D’ailleurs, dans l’idéal, ce ne sont pas les mêmes granulats utilisés pour un désactivé que pour un béton standard (si on souhaite un rendu optimal).
Le désactivé s’obtient avec plusieurs adjuvants. Je rédigerai un article dédié à ce sujet avec tous les détails, étape par étape. C’est proprement « magique » et les curieux (ou passionnés) seront ravis.
Les colorants pour béton
Certains béton sont destinés a rester bruts de recouvrement, il est donc intéressant de les rendre décoratifs en plus d’être structurels. Ces bétons sont en pleine progression depuis quelques années, souvent cumulés avec la propriété « drainante » évoquée plus haut.
Divers autres produits
Enfin, et pour conclure sur les types d’adjuvants béton, il existe également certains produits types qu’on peut ajouter au mélange :
- Les fibres : Une forme d’armature pour obtenir un béton plus cohérent. Voir un exemple de fibres ici.
- Les adjuvants plus rares comme l’AQUAbéton de CHRYSO qui permet de couler un béton directement en immersion.
- Le « Fluid » de Lafarge. Un ciment permettant de fluidifier les enrobages.
Comment intégrer les adjuvants au béton ?
Il existe plusieurs typologies de mise en œuvre pour ajouter des adjuvants au béton :
- En usine : La formulation et le mélange sont exécutés directement en centrale, par le cimentier. Il est ensuite livré directement sur le chantier par toupie.
- En produit conditionné ajouté : Les adjuvants sont fournis en bidons ou en « doses » à ajouter au mélange.
- En surfaçage après coulage : Particulièrement pour les produits de cures, éventuellement pour faciliter la désactivation par exemple.
Pour intégrer des adjuvants dans un mélange de béton, il faut prendre en compte plusieurs facteurs :
Calculer la bonne quantité : La plupart des adjuvants sont dosés en fonction de la masse de ciment (ex. : pourcentage du poids total du ciment). Un surdosage peut avoir des effets néfastes, comme une prise trop rapide ou une perte de résistance.
Éviter les erreurs courantes : Mélanger différents types d’adjuvants sans vérifier leur compatibilité, négliger les essais en laboratoire, ou mal les répartir dans le mélange sont des erreurs fréquentes.
Réaliser des essais : Avant de couler une grande quantité de béton, il est conseillé de réaliser des échantillons pour tester la réaction des adjuvants et ajuster le dosage si nécessaire.
L’impact des adjuvants sur différents types de béton
Béton haute performance : Grâce aux superplastifiants, il est possible de produire un béton extrêmement dense et résistant tout en réduisant la quantité d’eau. Cela permet d’augmenter la résistance à la compression et d’améliorer la durabilité.
=> Augmenter la résistance à la compression en Mégapascal (MPa) et se prémunir du risque de cisaillement.
Béton autoplaçant : Les adjuvants spécifiques permettent d’obtenir un béton qui se met en place tout seul, sans vibration. Le volume en ciment est souvent augmenté pour compenser l’usage des adjuvants plastifiants et maintenir la résistance.
=> Se libérer de la nécessiter de vibrer le béton, atteindre des zones de coulages peu accessibles.
Béton allégé : Les entraîneurs d’air permettent de réduire la densité du béton, en préservant une bonne stabilité structurelle. Cependant, il faut ajuster le dosage pour ne pas perdre en résistance. A prendre avec des pincettes (NdlR), et les cas sont relativement rares.
=> Permettre un coulage dans l’ancien (rénovation) sur des structures peu adaptées aux contraintes de charges.
Les tendances actuelles dans l’utilisation des adjuvants béton
Les innovations dans le domaine des adjuvants pour béton se multiplient, notamment pour réduire l’empreinte écologique de ce dernier. Si nous jetons un œil sur les sites internet des professionnels du secteur, ce n’est pas le seul avantage mis en avant.
=> Voir le programme CEMEX Admixtures pour les plus curieux d’entre vous.
Parmi les tendances récentes, on retrouve :
- Les adjuvants écologiques : Réduction de l’empreinte carbone en utilisant des composants plus naturels et moins polluants.
- Les bio-adjuvants ou adjuvants « biosourcés » : Développés à partir de matières organiques pour améliorer la durabilité sans effets néfastes sur l’environnement.
A lire : Chryso / Les solutions proposées par la branche chimie du groupe Saint Gobain.
Conclusion : Les adjuvants pour un béton performant
Les adjuvants nous facilitent la vie au quotidien, en terme de coulage du béton et de mise en œuvre. Cependant cela reste un sujet très technique et comme je le rappelle assez régulièrement : Quand on ne maîtrise pas, on contacte l’industriel concerné.
Les 3 grands leaders du marché seront vos interlocuteurs privilégiés : CEMEX, SIKA et CHRYSO.
Une mauvaise maîtrise peut compromettre la qualité du béton et engendrer des coûts supplémentaires.
En comprenant les spécificités de chaque adjuvant et en les intégrant de manière réfléchie dans la formulation du béton, il est possible d’améliorer significativement les propriétés du matériau et d’assurer la réussite du projet.
Merci pour vos lectures et bon chantier.
Serge USTUN.
Crédit photo de couverture : S.USTUN.