La construction ossature bois est éminemment technique. Chaque élément structurel joue un rôle précis, et c’est précisément le cas de la lisse basse.
Ce dossier s’adresse donc particulièrement aux constructeurs mais surtout à celles et ceux qui souhaitent se lancer dans l’autoconstruction de maison bois.
Nous allons décortiquer ce sujet dans le détail.
Cet article vient en complément du dossier : Autoconstruction maison en bois.
Qu’est ce qu’une lisse basse ?
La lisse basse en ossature bois est la pièce de bois sur laquelle l’ensemble de l’ossature sera réalisée. Cet élément de même section que le bois structurel qui compose le reste de la construction, est la pièce qui s’ancre dans la maçonnerie.
Synonymes :
- Lisse d’ancrage.
- Lisse d’implantation.
- Semelle (parfois employé mais peu pertinent).
Il existe deux types de lisses principales lorsqu’on construit en ossature bois :
- La lisse basse, ou lisse d’ancrage (sujet du présent article).
- La lisse haute (que nous détaillerons dans un article dédié) qui se comporte plutôt comme une « ceinture ».
D’un point de vue architectural, la lisse basse est l’élément en bois le plus bas d’une construction, et sur laquelle tout prend appui.
D’un point de vue structurel, cette lisse permet de fixer solidement les panneaux d’ossature d’une part (montants et contreventement), mais également d’absorber les défauts de planéité de la maçonnerie.
Pour les puristes :
Dans sa dénomination « lisse d’implantation », on comprend aisément la définition de cette dernière. Cependant il faut noter que cette définition est légèrement erronée. L’implantation en ossature bois est effectivement toujours dirigée par la maçonnerie qui la fonde en sous œuvre.
Quel bois d’ossature pour une lisse basse ?
S’il est possible de travailler avec des bois d’ossature en classe 2 (pour les murs en élévation), la lisse basse doit quant à elle impérativement être en classe 3 ou 4.
Ci-dessus : Lisse d’ossature en Douglas / Crédit photo : S.USTUN / Google Pixel 9 PRO.
Pour rappel, certains bois d’ossature sont naturellement « classe 4 » et ce sera sans aucun doute un détail d’exécution à garder à l’esprit au démarrage d’un éventuel projet.
La classe de bois
Les bois autoclavés sont évidemment adaptés (traitement classe 3) or il demeure une polémique quant à l’utilisation d’un bois de classe 4 qui selon moi est plus pertinent.
Les bois traités, rassurez vous, feront très bien l’affaire mais pourquoi donc se priver d’une lisse naturellement classe 4 : Le Douglas par exemple.
Les éclats, le perçage, et le sciage peuvent en effet affaiblir la protection d’un bois de classement inférieur, alors que cela n’aura aucun impact sur un bois naturel classe 4. C’est un point de vue pragmatique que je vous laisserai apprécier.
Lire mon article sur les bois d’ossature.
La section de la lisse
La section de la lisse basse est très exactement équivalente à la section des bois d’ossatures pour réaliser les montants ou la lisse haute. Si vos montants sont de section 45 x 220, alors votre lisse basse sera de même section.
Ci-dessus : Exemple de positionnement et de différence entre classe de lisse, et classe d’ossature en élévation. J’ai choisi cet exemple car vous pouvez remarquer « de visu » que la lisse autoclave n’est pas protégée « à cœur ». Cela se distingue par la différence de couleur sur la coupe. Crédit photo : S.USTUN / Google Pixel 9 Pro.
Encore une fois il n’y a là aucun mystère, et vous n’aurez aucune action particulière a effectuer sur ce point. En revanche, si pour une raison ou une autre votre bois de lisse est de section plus importante, cela sera handicapant lors de la réalisation du contreventement ou du bardage.
Vous pouvez distinguer, sur ma photo ci-dessus, que le voile travaillant vient recouvrir la lisse d’ancrage, ce qui serait impossible ci cette dernière était de section supérieure.
Par conséquent, vérifiez simplement que la lisse soit imputrescible et qu’elle soit de section équivalente à l’ossature.
NOTA : Quels sont les DTU concernés ?
Sachez que les DTU concernés par le présent sujet sont le DTU 31.2 et le DTU 20.1
Préparer la maçonnerie pour la lisse basse
La lisse basse est le bois d’ossature en contact avec la maçonnerie, mais c’est également l’élément d’ancrage principal. En d’autre termes, la lisse doit supporter les efforts d’arrachement et de poussée (efforts aux vents), ainsi que la stabilité dimensionnelle de la construction.
La maçonnerie doit faire l’objet d’un soin particulier pour assurer un ancrage de qualité : Planéité et niveau.
Deux éléments sont à considérer en priorité :
- 1. La planéité parfaite de l’arase dans sa petite largeur (semelle) et le nivellement parfait en tout point.
- 2. La solidité du soubassement : Maçonnerie pleine avec un excellent dosage du béton.
Le dosage du béton est essentiel à la bonne tenue des goujons d’ancrages ou des tirefonds. Les forces exercées lors d’un effort au vent sont très importantes et la nature (solidité) de la semelle fera toute la différence.
Nous avons déjà évoqué les moments de force dans plusieurs articles mais retenez simplement ceci : Mauvais béton = Défaut d’ancrage.
Lire mon article sur le dosage du béton.
Même si la lisse sert en partie à absorber les défauts de planéité de la maçonnerie, cette dernière ne doit pas être réalisée « à la va-vite ». Bien au contraire.
Malheureusement, rares sont les maçons qui soignent l’assise principale. Ces derniers imaginent (souvent à juste titre) que ce sera au charpentier de s’adapter.
Nota : Les maçons soignent rarement les assises car ils travaillent généralement sur lit de mortier, ce qui permet d’ajuster les appareillages. Malheureusement, une construction bois n’est pas réalisée au mortier !
Il est donc possible de récupérer des défauts de planéité grâce à la lisse basse.
Certains charpentiers vont même jusqu’à la contre caler. Attention tout de même à ne pas dépasser les seuils d’admissibilité. Le contre calage est à éviter autant que faire se peut.
Pour ma part, je soigne en priorité la maçonnerie afin de ne pas avoir de rattrapage à réaliser avec le bois. Cela nécessite de créer une réservation sur la semelle d’implantation afin de réaliser une parfaite arase. Il faut donc l’anticiper en phase conception.
Cette arase ne travaillera pas en arrachement car l’ancrage ira chercher le béton, nous le verrons plus bas.
Fixation de la lisse / Ancrage
La qualité de l’ancrage dépendra de la planéité et de la solidité du support, comme nous venons de le voir, mais également du calepinage des « ancres ». Certaines pratiques sont à écarter.
Quelques règles de base :
- Il est nécessaire de créer des chapelles (voir la définition ci-dessous).
- Les goujons d’ancrages devront aller chercher le béton et non pas l’arase.
- L’espacement des ancrages dans la maçonnerie doit être régulier et doit répondre à un calepinage précis.
- La profondeur de pénétration (dimension des goujons) doit être respectée.
- Il est possible d’utiliser un scellement chimique.
- Il est bon d’assurer la continuité des lisses et « réduire » les seuils à posteriori.
Les fixations possibles :
- Tiges ou tirefonds (pattes d’ancrages possibles).
- Vis spécialisées (je vous renvoie vers les spécialistes comme SFS ou Würth).
- Goujons d’ancrages ou douilles d’expansion.
Règles de dimensionnements :
Dans un monde idéal, vous devriez être passé par le bureau d’étude qui vous aura gentiment confié le calepinage des ancrages ainsi que la section de la visserie.
Si ce n’est pas le cas, vous pouvez vous reporter au DTU 31.2 et réaliser vous même les calculs. Bonne chance !
Enfin, si vous souhaitez faire simple, je vous donne une règle simple à retenir : Un ancrage dans chaque angle avec une distance maximale de 10 / 12 centimètres de l’extrémité. Puis un ancrage au droit de chaque panneau de contreventement.
Dans tous les cas, les ancrages ne peuvent pas être espacés de + d’1 mètre.
Dans le cas d’ouvertures ou d’encadrements en pied (porte, baie, etc), il faudra ancrer la lisse au droit des futures huisseries. Référez vous au plans d’exécution et tentez de ne pas lésiner sur les moyens.
Pour les puristes :
Certains confrères ajoutent un feuillard métallique en renfort avec un refoulement sur la dalle brute intérieure. Personnellement je n’utilise jamais de feuillard mais je soigne les ancrages pour rigidifier la structure à l’arrachement (poussées du vent essentiellement).
*Chapelle : La chapelle est un forage de large diamètre à profondeur superficielle qui permet de noyer la quincaillerie. Il est nécessaire d’avoir un forêt à bois plat.
La rupture de capillarité / EPDM
La lisse basse doit être fixée sur l’arase mais doit être désolidarisée de la maçonnerie par une « bande d’arase ». Généralement en EPDM. Si vous ne disposez pas d’EPDM vous pouvez réaliser cette rupture à l’aide d’une bande bitumineuse.
Prix moyen d’une bande d’arase en EPDM : de 30 à 70 euros TTC le rouleau de 30 mètres linéaires (selon la qualité et la largeur de la bande).
Les bandes d’arases (toutes prêtes) disposent de largeurs différentes car elles sont censées s’adapter à la section de la lisse. Autrement dit, veillez à choisir la bande d’arase dont la largeur est supérieur à la largeur de l’ossature.
Les largeurs disponibles sont de 20 / 25 / et 30 centimètres. Les longueurs en rouleau existent de 20 à 50 ml. Les prix peuvent varier selon les fournisseurs et selon les périodes. Je vous donne quelques exemples ici :
- Bande d’arase sur Chausson Matériaux = 46 euros TTC le rouleau.
- Bande d’arase sur SUD BOIS = 38 euros TTC le rouleau.
- Bande d’arase sur Matériaux naturels = 72 euros TTC le rouleau.
Les étancheurs qui me lisent n’auront pas de peine à réaliser eux même leur propre bande d’arase en « débitant » dans leurs rouleaux habituels de bardeau bitumé (Soprema ou autre).
La « surverse » ou le « reliquat » d’épaisseur doit toujours pendre côté extérieur de la semelle. Cependant il n’est pas nécessaire que cette « sur-longueur » soit présente. Cette dernière doit protéger la lisse en exerçant une rupture de capillarité, il est inutile qu’elle retombe de 10 cm.
En revanche, cette dernière ne doit pas laisser « à nu » la semelle en partie extérieure, et doit la recouvrir totalement.
Une variante au bois : La Purenit
Solution intéressante et innovante : La Purenit.
Développée par une entreprise située dans le Rhône (69), la Purenit est utilisée pour la fabrication de lisses basses en remplacement du traditionnel bois d’ossature.
C’est un matériau intégralement issu du recyclage. Le concept se veut vertueux et c’est effectivement le cas.
Dans notre cas, ce qui doit nous interpeller sur ce produit est son efficacité thermique (excellent rupteur) et son imputrescibilité. Parfait pour optimiser son ossature avec un matériau mécaniquement stable, vissable, et prévu pour remplacer la lisse d’implantation traditionnelle.
Je vous invite à découvrir le produit sur la fiche du fabricant Arktic.
Nous reviendrons sur la Purenit dans un article dédié car ce produit se décline également pour la réalisation des précadres et entre par conséquent pleinement dans le cadre de nos analyses.
Les panneaux d’ossature préfabriqués hors site
Il est souvent question de supprimer la lisse basse, argument souvent évoqué lors des forums et sur certains sites.
Avec la montée en charge des constructions bois en kit et des ateliers de fabrication hors site, il n’est pas rare d’éluder la question.
En ce qui me concerne je serai formel, la lisse basse ou lisse d’ancrage, n’est pas une option. Or, par définition, elle ne peut pas être assemblée en usine, car cela n’aurait aucun sens.
Les panneaux d’ossatures préfabriqués devront être vissés sur une lisse préalablement ancrée sur la maçonnerie, et sur site. Cela ne doit induire aucune ambiguïté : La lisse n’est pas optionnelle !
Vous décidez de vous lancer dans un projet de construction bois alors soignez les détails et facilitez vous la vie. La lisse d’implantation vous permet de réaliser une construction dans les règles de l’art mais vous épargnera surtout bien des réglages !
Conclusion
Dans la continuité de mon dossier sur l’autoconstruction de maison bois, comprendre et maîtriser la notion de lisse basse est important. C’est la base au sens propre du terme.
Son rôle, le choix du bois, les contraintes de pose sont autant d’éléments qui vont assurer la pérennité de la construction ! Assurez vous de soigner ce poste car c’est évidemment sur cette pièce de bois que reposera votre maison !
Merci pour vos lectures et bon chantier.