L’isolation à 1 euro a eu ses années de gloire. Il semblerait que ce soit terminé. Cependant, durant ces nombreuses années, il y a eu du bon, comme du moins bon et surtout malheureusement des sinistres. Entrepreneurs peu scrupuleux et opportunistes ont entaché la profession. Retour et analyse sur le sujet de l’isolation à 1 euro:
L’isolation à 1 euro : Procédé et analyse
Ces dernières années ont vu fleurir un nouveau métier: Les isolateurs !
Quasi essentiellement en combles perdus, simplicité oblige pour ces opportunistes du bâtiment. Le mot est fort, critique, et assumé.
Qui n’a jamais été démarché par ces entreprises, qui offrent une isolation des combles à 1 euro ? Analysons sérieusement cette pratique sur un plan technique et sur un plan éthique.
1 – L’isolation à 1 euro c’est quoi ?
La question est double. En premier lieu il faut analyser l’offre : Une isolation de vos combles perdus par insufflation de laine minérale en vrac.
Pour simplifier, ces entreprises viennent chez vous déposer quelques tuiles, et injecter dans vos combles une certaine épaisseur de laine de verre, de roche ou plus couramment de la ouate de cellulose.
En règle générale, l’épaisseur de l’isolation gravite autour de 30 centimètres. Parfois, les entreprises retirent l’ancien isolant, parfois non. Le tout pour 1 euro symbolique.
2 – La technique :
La technique peut être multiple, mais tous cherchent à l’optimisation de temps et d’effort.
En d’autres termes il faut aller vite, très vite et ne rien déconstruire ou presque. Les entreprises qui proposent ce service, dans leur grande majorité, ne sont pas des entreprises du bâtiment. Elles ne sont pas suffisamment qualifiées et doivent donc agir au plus simple.
- levage de quelques tuiles.
- découpe du pare-pluie quand ce dernier est posé
- passage par une trappe d’accès pour accéder aux combles.
Le manque de qualification (du à cette nouvelle niche bien juteuse), permet donc à n’importe qui de s’établir comme isolateur, sans être ni couvreur, ni charpentier de formation.
Par conséquent, faites attention aux (nombreux) risques qu’implique la réalisation d’une isolation des combles par une entreprise peu, voir pas qualifiée.
Lire mon article sur les départs de feu en terme de sinistralité du bâtiment
Les avantages d’une isolation en combles perdus:
L’isolation par insufflation présente de nombreux avantages. Ce n’est pas le procédé que je passe au tamis de la critique, car il demeure une méthode d’isolation très pertinente.
Avantages :
- Le premier avantage est le côté « non invasif » de l’opération. Rien ou presque n’est démonté.
- La rapidité de mise en œuvre est également un avantage certain. En effet, insuffler l’isolant pour une maison de 85m2 habitables ne tient qu’en une demi journée.
- Dernier avantage, l’isolant est parfaitement homogène et créé un matelas d’épaisseur (variable selon les offres) et assure la rupture des ponts thermiques. En d’autres termes, l’isolant va partout où le déroulé de laine (par exemple) n’irait pas.
Les inconvénients (ou risques)
Les inconvénients d’une insufflation en vrac sont également nombreux, et certains sont même critiques :
- Ancienne laine de verre laissée en place : Fort risque de départ de feu ou d’incendie (phénomène du matelas)
- Mauvaise qualité de la matière utilisée, souvent pour des raisons financières, manque de traçabilité (problème du vrac)
- Poids de l’ensemble : Les joints placo peuvent (et vont) fissurer sous le poids de l’isolant, ce dernier n’étant pas maintenu par l’ossature du faux plafond. Tout le poids pèse sur les plaques de plâtre. La densité au mètre carré est rarement prise en compte.
- Ecart au feu non respecté : C’est ici que débutent la plupart des départs de feu.
En effet, de nombreux départs d’incendies, ou incendies graves, trouvent leur origine dans cette méthode d’isolation. Non pas dans la méthode elle-même, mais par le nombre d’entreprises trop peu qualifiées qui exercent sans respecter les règles de mise en œuvre.
Ce problème se ressent essentiellement en rénovation, car dans le neuf les règles de l’art sont très largement respectées.
Le manque de respect des règles de mise en œuvre:
La première malfaçon, la plus courante, est le non respect des épaisseurs annoncées.
Même si la plupart des entreprises sérieuses pose des « piges » de niveau notées en centimètres, d’autres ne le font pas. Ce n’est pas à proprement parler une pathologie mais plutôt une manœuvre économique.
Un grand nombre de chantiers sont réalisés sans prise en charge d’une quelconque « éthique ». Les principaux désordres sont, par conséquent, un manque de pertinence du procédé. Cela induit des malfaçons :
- Ponts thermiques non gérés
- Création d’un matelas d’isolant « lourd » et potentiellement accidentogène
- Aucune possibilité de sonder l’état des réseaux « enfouis » dans l’isolant principal, notamment les « cloches » de protection des spots encastrés.
Les risques sont également grands en ce qui concerne le non respect des écarts au feu. Par expérience, ils ne sont presque jamais respectés, et c’est pire encore lorsque cela concerne les spots encastrés. L’enfouissement des boites de dérivations est également assez fréquent, et potentiellement dangereux.
Il ne faut jamais créer un matelas isolant, en laissant la 1ère couche de déroulé en place !
La notion de « découpage » du pare-pluie est elle aussi très discutable. Un pare-pluie ne peut (ni ne doit) être coupé en quelques points que ce soit. Dès lors qu’il est découpé, il n’assure plus son rôle principal.
Le risque pour l’entrepreneur : La perte de la décennale
Outre le fait que l’entrepreneur puisse être poursuivi pour une mauvaise exécution (dans le meilleurs des cas), ou simplement au pénal en cas d’incendie, la déchéance de la décennale sera garantie (sans jeu de mots).
Les assureurs ne prennent plus aucun risque aujourd’hui, en terme de malfaçon « prévisible ». En effet, dans ce cas de figure, un travail correctement effectué ne peut pas engendrer de désordre.
La garantie décennale est censée prendre en charge des désordres involontaires ou difficilement gérables. En aucun cas cette garantie ne doit se soustraire au respect des règles de l’art.
Un questionnement légitime
Il y a eu un tel engouement pour ce « frais business », que tout le monde s’y est mis. La plupart des entreprises n’étant, ni de près ni de loin, du métier. Ces dernières sont pourtant toutes RGE, ce qui amène au questionnement, sur la pertinence de ces formations et labels.
L’enlèvement de la laine de verre (le plus souvent), avant la projection de l’insufflation, n’est lui non plus presque jamais respecté. Ce sujet est hautement problématique en terme de sinistralité.
Bref, beaucoup de bricoleurs ont investi un métier, prenant des raccourcis dont les conséquences peuvent être graves, en cas de manquement.
Certaines sociétés sont assez sérieuses, et font correctement le job. Cependant, le réseau étant devenu un gigantesque réseau de franchisés, il est difficile de citer une marque en particulier.
Il faudra lire les avis au cas par cas sur Google, pour se faire un avis définitif en cas de sollicitation d’une de ces entreprises. Dans le neuf en revanche les entreprises sont sérieuses.
Espérons que les mœurs changent, et que les nouveaux isolateurs soient plus consciencieux que ceux de la décennie qui vient de s’écouler.
Merci pour vos lecture et bon chantier
Serge USTUN