Dans la construction neuve, le ravoirage est une technique omniprésente en France. Mais qu’appelons nous « ravoirage » ou plus précisément « chape de ravoirage » ?
En quoi cette technique amène le questionnement ? Faire passer les flux de plomberie et d’électricité dans la chape maigre est-il concrètement un avantage, ou un inconvénient ?
Quelle épaisseur de chape de ravoirage est nécessaire pour être réglementaire ? Je tente de vous apporter mon avis professionnel ici, basé sur mes propres chantiers.
La technique du ravoirage
Le ravoirage, ou « chape de ravoirage » est considéré comme une chape maigre (même s’il existe des ravoirages liquides). C’est un substrat composé essentiellement de sable, de ciment très peu dosé, et d’eau.
Il est sablonneux et son rôle n’est en rien celui d’une dalle. Son unique intérêt est économique : C’est le système d’enrobage le moins coûteux.
Il permet d’enrober les fourreaux de l’électricien et du plombier mais surtout, de préparer un support de scellement pour le carrelage, ou plus généralement, pour les revêtements de sols.
L’épaisseur (la hauteur) du vide avant l’application du ravoirage se nomme : La réservation.
Il est encadré par les DTU 26.2 (pour les dalles et chapes non structurelles) et 52.1 (pour les scellement de revêtement de sols)
L’épaisseur d’une chape de ravoirage
Dans le cas d’une construction neuve, le ravoirage est une fine épaisseur de « maigre » (mortier très peu dosé) venant sur la dalle, sous le revêtement de sol fini. Il joue à la fois le rôle d’un enrobage et de méthode de scellement.
En moyenne, l’épaisseur d’une chape de ravoirage est de 6 à 8 centimètres, parfois moins. Le ravoirage a deux utilités bien distinctes. Il permet d’une part d’enrober les flux élec et plomberie qui filent sur la dalle brute. D’autre part de sceller le carrelage en exécutant une pose directe sur chape (ravoirage en l’occurrence) donc sans colle.
Son épaisseur est donc très importante : L’enrobage doit être en tout point supérieur à 3 ou 4 centimètres au dessus des fourreaux.
Et pour répondre aux questions : Oui la pose scellée de carrelage est toujours autorisée.
En résumé le ravoirage sert à:
- Enrober les gaines et fourreaux qui « filent » sur la dalle brute, en électricité et plomberie
- Créer une chape de scellement pour faciliter la pose du carrelage définitif
- Ne pas s’inquiéter des défauts de la dalle brute (dalle de compression).
On distingue (sur cette photo) que dans cette technique les cloisons, doublages et bâti de portes, sont montés avant le ravoirage ! (Chantier S.USTUN dans la Drôme)
L’électricien et le plombier sortiront leurs « attentes » pour les appareillages, directement dans les cloisons et doublages, le ravoirage venant enrober tout le reste.
Nota: Attention, en cas de rénovation ou modification de cloisons, à ne pas percer dans un fourreau !
Ravoirage: Utile et économique
Le ravoirage étant du maigre (peu de ciment), il est donc très économique. C’est essentiellement du sable.
Clairement plus économique que toute autre chape d’enrobage. Le ravoirage est également très utile car il permet de pallier aux éventuelles erreurs de nivellement, suite au coulage de la dalle de compression, et donner au carreleur la possibilité de régler son niveau définitif in situ.
Les risques d »une mise en œuvre inadaptée :
- Risque que la réservation ne soit pas suffisante: manque d’épaisseur à l’enrobage en tout point minimum de 3 ou 4 centimètres au dessus des fourreaux
- Risque de ne pas clairement identifier où passent les fourreaux ELECRICITE et PLOMBERIE
Lire mon article sur l’utilité des chapes maigres
Il existe également des procédés de chapes de ravoirages plus « liquides ». Ces procédés sont mis en œuvre par des « applicateurs » spécialisés, cependant, cela reste une technique plus marginale que la chape maigre.
Pourquoi le ravoirage questionne ?
Ce ne sont donc que des qualités qui accompagnent le ravoirage à une exception :
Les flux d’électricité et de plomberie ainsi enrobés, il ne s’agit pas d’avoir une intervention en SAV.
Bien souvent il sera très compliqué d’intervenir, voir impossible.
Les flux de plomberie notamment, qui viennent aggraver la situation en créant un dégât des eaux généralisé dans la construction, en cas de défaillance.
Ce cas de figure réel étant dès lors clairement un désastre !
Vous le savez sans doute, j’œuvre dans l’après sinistre depuis de nombreuses années, c’est donc sur la base de mon expérience que je déconseille cette technique. Le ravoirage oui, clairement. Mais le passage des gaines dans le ravoirage : C’est Non !
Lorsque je conçois mes constructions, je prévois des combles techniques. Des « caissons techniques » dans lesquels j’organise ma distribution. Le passage en plenum est également plus fiable de mon point de vue, que le passage dans la chape maigre.
Rapidement nous vient à l’esprit le questionnement sur le chauffage au sol évidemment. Je vous invite donc à patienter car un article sur le sujet est en cours de rédaction. J’aurai, dans cet article, le concours d’un spécialiste en la matière : Le fabricant SEAC.
Sur cette photo, lors d’un de mes chantiers suite à un sinistre, on distingue bien que l’épaisseur de ravoirage sur les flux d’électricité n’est clairement pas suffisante. A peine 1 à 2 centimètres avant de distinguer les fourreaux !
Contre argument
Un contre argument, notamment sur le passage en plénum, revient souvent lors de mes conférences (ndlr / S.USTUN). Si le passage des gaines dans le ravoirage est risqué, que dire de son utilisation en plénum ?
Oui le risque est aussi important mais la douloureuse moins prononcée en cas de sinistre.
Pour l’électricité :
Aucun contre argument, car les électriciens passent déjà en plénum pour toutes les distributions type éclairage et VMC. Ils ne passent dans le ravoirage que les prises de courant et les attentes de radiateurs en général.
Pour la plomberie :
Ici le contre argument est valide, cependant : Pensez-vous qu’il soit plus ou moins onéreux de remplacer du ba13 en plafond que du carrelage au sol ?
Car bien souvent, le carrelage est uniforme donc remplacer deux mètres carrés est impossible. Il faudra harmoniser donc remplacer 60 M2 ou plus selon le logement.
Il faudra déposer la cuisine, sortir les meubles, déposer les blocs portes parfois (car le bâti est scellé dans le ravoirage et finira par pourrir). Déposer toutes les plinthes et finalement effectuer un ragréage pour tout recoller.
En un mot: une intervention hors de prix !
Par ailleurs, notons qu’un dégât des eaux sera plus rapidement visible en plafond. Cela permet de rapidement intervenir et stopper la fuite. Lorsque la fuite est située dans le ravoirage, les premières apparitions de spectres de moisissures tardives sont catastrophiques, car tout sera impacté dans la maison, bien avant qu’on ne s’en rende compte.
Le ravoirage hors sinistre
Hors sinistre, nous pouvons évoquer un simple SAV. Une simple prise 10/16 défaillante par exemple.
Retirer du 3G2.5 en ravoirage est, très clairement, le plus souvent impossible. Lors des différentes rénovations ou aménagements, il n’est pas rare non plus de percer en plein sur un fourreau pour une modification de cloison par exemple.
L’épaisseur de la chape de ravoirage prend ici tout son sens.
Evidemment, dans le doute, les plaquistes utilisent des clouages de 2.5 centimètres maximum ou « collent » les armatures.
Même dans ce cas, nous voyons que le risque de percer une gaine est grand.
En conclusion:
Ma conclusion vous la devinez. La technique de ravoirage pour le scellement de carrelage et le réglage de niveau, je valide à 100 %.
Pour le passage des fourreaux, gaines, électricité et plomberie, je dis clairement non. C’est une hérésie constructive, et une technique basée uniquement sur la rapidité de mise en œuvre. Proscrire cette méthode sera sans aucun doute une façon efficace de prévenir des gros problèmes à venir.
Lire également sur le sujet : Réaliser une chape de ravoirage ou un simple ragréage ?
Pour aller plus loin, une technique novatrice en chape légère de ravoirage chez Sika
Merci pour vos lectures et bon chantier !
Serge USTUN