Dossier Thématique : Renfort de poutre et solutions techniques adaptées.
Le renfort de poutre est un sujet principal que tous les artisans rencontrent, tôt ou tard, sur leurs chantiers de rénovation. Ce sujet, au premier abord très technique, s’ouvre depuis quelques années sur de nouvelles solutions non destructives.
Le renfort des poutres en rénovation
C’est principalement en rénovation que sujet du renfort de poutre se pose. Les bâtiments vieillissant, le problème de la flèche (fléchissement) devient parfois préoccupant, cependant ce n’est pas la seule pathologie en cause.
Il convient de clairement identifier les cas nécessitant un renfort :
- Fléchissement
- Cisaillement
- Dégradation du matériau
- Consolidation des assemblages
- Prévention du risque (aménagements ultérieurs)
Il peut être nécessaire d’effectuer un renfort sur des poutres qui présentent déjà une forte flèche, ou plus simplement en prévision d’un futur aménagement, qui va inévitablement ajouter du poids sur les porteuses.
Dans le cas des aménagements de combles, se sont les poutres porteuses qui sont visées.
Il n’y a pas de magie, et par conséquent, il faut trouver des solutions de renfort adaptées, et si possible, sans avoir recours au remplacement.
Les méthodes non destructives se présentent comme réellement pertinentes dans presque tous les cas de figure.
Renfort de poutre en après sinistre
Tout comme pour les dossiers en rénovation, l’après sinistre doit également s’emparer du sujet. Bien trop souvent, la décision de remplacement, donc destructive, est posée comme seule solution technique envisageable.
Cependant, les techniques ont évolué, et il n’est plus nécessaire d’effectuer une démolition puis une reconstruction après sinistre.
Le moisage s’est très largement démocratisé ces dernières années dans le secteur de l’après sinistre, encore malheureusement trop peu maîtrisé par les intervenants.
Les solutions de renforts existent, il s’agit simplement de solliciter les bons bureaux d’études.
Dans le cas de combustion partielles suite à un sinistre incendie, ces techniques peuvent vous épargner de lourds et coûteux travaux.
La grande force du renfort réside dans son caractère non destructif, particulièrement apprécié lors d’un accident déjà très anxiogène pour les assurés.
Renfort de poutre bois : Les solutions non destructives
Les solutions globales :
- Moiser la poutre
- Poser un pilier pour créer un point d’appui supplémentaire
- Créer des jambages ou retrousser les poutres (blochets, contre-fiches etc.)
Si l’accès à la poutraison est circulable, toutes les solutions peuvent être envisagées. Certaines sont plus simples à mettre en œuvre alors que d’autres impliquent de lourds travaux.
Dans ce dossier, l’idée est donc de simplifier au maximum les interventions en préservant une efficacité de réparation structurelle fiable.
Les méthodes non destructives sont, par conséquent, les plus séduisantes.
Poutres bois : Il est parfois possible d’intervenir également en « correction » de flèche.
Solutions techniques non destructives :
- SFS STADLER : Réalisation de vis de renforts sur mesure avec appui du bureau d’étude
- WURTH : Les vis à bois pour le renforcement des assemblages
- HECO SCHRAUBEN : Les vis combi-connect, solution de renfort par vissage intéressante
Avantages des procédés ci-dessus :
- Possibilité de renfort sans avoir un accès complet aux poutres (par dessus & par dessous)
- Faible temps de mise en œuvre (aucune manutention, travail de précision rapide)
- Disponibilité immédiate des solutions après étude (même pour le sur mesure chez SFS)
- Pas de « chantier » au sens commun du terme, les lieux peuvent rester occupés
- Peu coûteux
Inconvénients :
Ces méthodes ne sont pas adaptées à tous les cas de figure.
Méthode longuement utilisée : Le moisage
Il existe plusieurs méthodes historiques dont une qui s’est largement développée, longtemps considérée comme étant la seule méthode de reprise : Le moisage.
Le moisage, technique ancestrale, c’est mis au goût du jour avec l’apparition de produits dérivés du bois. Le trois plis est régulièrement utilisé, encore aujourd’hui, pour le renfort de poutre dans le cas du fléchissement.
Cette solution est malheureusement fastidieuse à mettre en œuvre.
Exemple :
Sur un de mes chantier en Savoie, le bureau d’étude me proposait une reprise de flèche, sur une panne faîtière en madrier empilé non conforme (1 mètre de hauteur en 5 madriers x 0,20 centimètres de largeur sur 12 mètres de longueur). L’usine aurait du proposer une panne faîtière en lamellé collé, d’une seule pièce de bois, pour assurer un tel franchissement.
Le bureau de contrôle invalide donc le chantier.
Le bureau d’étude me propose un moisage en trois pli toutes longueurs, et toutes hauteurs. Pour réaliser le moisage, il me fallait près de 6000 pointes à spiter. Cette solution me semblait inenvisageable (les cloueurs à gaz ne fonctionnent pas en haute altitude).
Sur ce chantier, j’ai donc pu étudier les 3 solutions alternatives : Visserie, résine et moisage en trois plis.
Solution choisie :
Utilisation des vis techniques fabriquées sur mesure par la société SFS Stadler.
Coût :
10 à 15 fois moins cher à l’achat comme à la mise en œuvre. Temps de mise en œuvre : 1 jour.
Défauts du moisage :
Je privilégie parfois le moisage, selon les cas, or il n’est pas exempt de défauts.
- Les moises sont apparentes, souvent disgracieuses : Incompatible en cas de visuel sur les poutres
- Le clouage des moises est trop souvent réalisé de manière empirique, sans réelle étude de clouage
- Efficace quand il est filant : Un moisage partiel (tel que je l’ai constaté sur des expertises) n’est pas efficace
- Si la poutre est utilisée comme support de structure (suspentes de BA13 par exemple), le moisage devient très compliqué à réaliser
Solutions innovantes à base de résine :
Il existe des techniques de reprises de poutres à l’aide d’une injection de résine. Le procédé est fiable et terriblement efficace. L’injection de résine est une solution, non destructive, très séduisante.
Elle est particulièrement plébiscitée pour le renfort des charpentes dans les monuments historiques, par exemple, ce qui lui vaut une certaine notoriété.
Cette solution est plus naturellement adaptée aux poutres en bois plutôt qu’aux poutres en béton.
En revanche, une fois maîtrisée, la technique à base de résine (époxy) est redoutablement efficace. Ici, encore, il est nécessaire d’obtenir un schéma de mise en œuvre précis élaboré en bureau d’étude.
Avantage de la résine pour le renfort de poutre :
- Comme pour la visserie, cette solution est visuellement parfaite (après rebouchage il ne reste aucune trace de l’intervention)
- Solution de reprise en sous œuvre particulièrement évidente : Accès facilité
- Simple à mettre en œuvre
Inconvénient :
Le coût parfois prohibitif au regard de l’apport de matière.
Pièce rapportée : La pose d’un pilier (ou poteau)
La pose d’un pilier, en bois ou maçonné, est une solution viable, et fiable.
Elle permet de diviser les efforts d’une poutre qui porte habituellement sur deux appuis. Poser un pilier permet, par conséquent, de réduire les longueurs de franchissements entre deux appuis.
Cette solution, très certainement la plus intuitive pour le renfort de poutre, n’est pas non plus exempte de tout défaut :
- Nécessité de créer un point d’appui au droit du pilier : Ce dernier doit donc supporter la descente de charge nouvellement créée
- Risque de créer un désordre là où initialement il n’y en avait pas : Création d’un moment de force au droit du pilier et au point d’appui
- Encombrement d’une éventuelle zone de passage : Présence d’un pilier au milieu d’une pièce
Un pilier n’est pas nécessairement posé à l’axe d’une poutre. Il peut être positionné, selon étude, à n’importe quel endroit qui permet de soulager le vide entre deux appuis.
Les poteaux, rapportés aux points d’appuis, peuvent également être une solution, fonctionnelle uniquement pour soulager le moment « tranchant » au droit des empochements de poutres. Cela revient à soulager la pièce au droit de son appui.
On peut également assimiler cette technique à la pose de blochets ou de sabots. Dans les deux cas, on « dilue » le point singulier de l’appui.
Dans le cas des poteaux, on transmet la descente de charge sur le sol, alors que pour les blochets, les moments de forces sont exercés sur les murs.
Renfort poutre béton
Solution technique valable à la fois pour les poutres, mais également pour les poutrelles béton.
Le renfort des poutres béton est très particulier, mais potentiellement plus simple à gérer. En effet, le béton est un matériau plus inerte que le bois, dont on connait parfaitement bien les réactions aux efforts.
Pour tout type de poutre béton, qu’elle soit de type PSS en précontraint, ou coulée en place, les solutions de lamelles en carbone sont aujourd’hui incontournables.
Solution à la fois fiable et bien plus simple à mettre en œuvre que tout autre technique, les lamelles carbones sont la panacée du renfort de structure béton.
ATTENTION : Le béton cisaille de façon assez inattendue et soudaine. Contrairement au bois, il s’agit de créer une grande zone de vigilance autour des structures impactées.
Lire mon article sur le renfort par lamelles carbones
Impossibilité de renfort, nécessité de remplacement
Parfois, il est strictement impossible de proposer une solution de renfort. Ces cas seront toujours présents quoi qu’il arrive, dans le cadre d’un dégât trop important.
Dans cette analyse de cas, j’évoquerai mon expérience sur une panne intermédiaire ayant subi un simple dégât des eaux sur un temps long. Cette dernière semblait déjà impactée par des insectes xylophages, ce qui vient en élément aggravant.
La poutre s’est lentement dégradée, attaquant le bois par effet de « pourrissement ». La voie d’eau finira par engendrer le phénomène de « cisaillement », que je ne pourrai malheureusement pas consolider en l’état.
Après avoir poser un sabot bois, solidement scellé, chaque tentative de renfort s’est soldée par une désagrégation de la matière.
Solution technique :
Aucune. Seul le remplacement de la poutre est possible dans ce cas de figure.
Conclusion
Le remplacement de poutre, nécessitant une action destructive, peut dans bien des cas être évité. Les solutions de renforts existantes sont aujourd’hui très largement éprouvées. Par conséquent, il est devenu parfois inutile d’envisager une démolition/reconstruction.
Les reprises et renforts en sous œuvre de poutraisons, pannes, faîtières ou poutres porteuses en béton sont bien plus responsables dans le cadre d’un renfort.
Renseignez vous sur les méthodes par visserie, par apport de résine ou par lamelles de carbones, vous pourriez être étonnés des avantages économiques de ces méthodes.
Bien évidemment, il convient de faire valider la solution technique par un bureau d’étude qualifié.
Merci pour vos lectures et bon chantier.
Serge USTUN