Nous y sommes ! Le « Cool Roofing » nouveau est arrivé. Cette méthode qui permet de réfléchir les rayons du soleil et abaisser la température des bâtiments en été se développe et s’organise.
Revêtements polymères, peintures cool roofing, étanchéité liquide blanche : C’est la nouvelle donne des toitures « responsables ».
Est-ce réellement efficace et dans quelle mesure le « cool roofing » est adapté aux différents types de toitures ?
La réponse est ici.
Qu’est ce que le Cool Roofing ? Définition
Le Cool Roofing est une discipline naissante dans le bâtiment. Sa définition est simple.
« Cool » signifie fraicheur en Anglais. Vous avez très certainement déjà du avaler un « kiss Cool » au moins une fois dans votre vie, ces fameux bonbons mentholés.
« Roof » signifie Toit ou Toiture en Anglais. Le rapprochement des deux mots prend tout son sens : Rafraichir les toitures ou « toitures fraiches ».
Le procédé pour réaliser un cool roofing est pragmatique, car il implique simplement de rendre la toiture la plus réflective possible en la dotant d’une couleur blanche.
Le principe est désespérément simple.
En revanche, la technique employée peut s’avérer parfois complexe, notamment lorsqu’il s’agit de recouvrir les bardeaux bitumés, les membranes d’étanchéités qu’elles soient en bitume, ou en PVC.
Terminologie à connaitre :
- IRS : Indice de réflectance solaire (ou SRI)
- Réflectivité : Capacité à réfléchir les rayons du soleil
- Couleur du support : Pleine masse pour les membrane par exemple
- Effet Albedo : Effet naturellement généré par les matériaux réfléchissants
- RS : Réflexion solaire
Ci-dessus : La vidéo polémique de la Fédération Française du Bâtiment sur le procédé. Source : FFB
De la même manière que le « R » pour « Résistance Thermique » fait office de talon pour les isolants, le « SRI » pour « Indice de Réflectance Solaire » donne le ton en matière de « cool roofing ». Plus la valeur est élevée, plus le procédé est efficace.
- Couleur Noire : SRI 0 (totalement inefficace)
- Couleur Beige : SRI de 75 à 85
- Couleur Blanche : SRI de 95 à 110 (parfaitement efficace)
La peinture cool roofing
La première « niche » exploitée par les industriels est évidemment celle qui est la plus accessible sur le plan technique : La peinture.
L’effet Albedo étant en lien direct avec la couleur, cela paraît évident que la peinture intervienne dans le process, d’autant que c’est justifié. Avec une solution peinture cool roofing, on se dispense de couvreur ou d’étancheur, et on agit directement.
Cependant la peinture spécialisée « Cool Roof » est la plus décriée des méthodes, même si elle demeure la plus simple à mettre en œuvre. Analysons le sujet.
Maestria était un des industriels les plus attentifs à la question. Ils ont développé la gamme Thermistria, pour répondre à la demande. J’apprécie la marque pour sa large de gamme de peintures intérieures, vous le savez si vous me lisez régulièrement.
En revanche le jeu en vaut-il réellement la chandelle ?
La FFB nous démontre par les statistiques que seuls 5% des cas de cool roofing sont efficaces. Tout du moins, seulement 5% des bâtiments seraient adaptés pour que le cool roofing soit pertinent.
Dès lors, nous sommes clairement sur des solutions voulues comme globales, mais qui ne répondent qu’à un besoin très marginal.
- Les toitures des centres commerciaux et autres grandes structures (gymnases, salles polyvalente etc.)
- Le tertiaire, les bâtiments agricoles
Thermostria : La peinture cool roofing par Maestria
Ces procédés entrent de plein droit dans mon dossier sur l’efficacité des peintures thermiques que je décortique dans plusieurs de mes articles, entre poudre aux yeux et fausses informations. Consulter mon dossier sur la peinture thermique ici.
L’étanchéité bitumineuse blanche est arrivée !
J’étais décidément bien avisé lorsque j’évoquais la question dans un de mes articles un an plus tôt.
Lorsque dans le dit article, j’affirme que les leaders de l’étanchéité bitumineuse, tels que la Soprema, devraient développer une membrane blanche, je ne croyais pas si bien dire.
C’est aujourd’hui chose faite.
Soyons humbles, il y a fort à parier que la Soprema était déjà en phase de développement au moment où j’écrivais mes lignes.
Cependant, l’industriel est aujourd’hui fin prêt et propose des membranes « cool roof« .
Particularité : Les membranes sont blanches et teintées en pleine masse ! C’est rassurant.
Croyez moi, si la Soprema s’en mêle, c’est que la dynamique est lancée. L’industriel est sérieux et ses produits répondent à une demande certaine. Par conséquent, nous ne sommes plus sur un segment « marginal » mais au début d’une grande vague de commercialisation des produits « cool roof ».
Attention cependant, il est ici question d’une membrane bitumineuse qui apporte les mêmes qualités d’étanchéité que les précédentes. Autrement dit, cela ne change en rien les garanties apportées par la membrane elle même, qui reste d’une efficacité inattaquable.
Dans ce cas, la décennale du poseur n’est en rien remise en question.
La membrane d’étanchéité spéciale pour le cool roofing chez SOPREMA.
L’étanchéité liquide spéciale cool roof
En parallèle des membranes de bitume à souder blanches, la Soprema (et d’autres industriels) développe un système d’étanchéité liquide « cool roof » blanche.
Dans le cas d’une étanchéité liquide (SEL), le procédé ne change pas, comme pour les membranes bitumineuses. Cela ne suscite par conséquent aucun questionnement technique particulier.
Les étanchéités liquides, lorsqu’elles sont appliquées par de véritables professionnels, sont efficaces et éligibles aux différentes garanties.
Soprema n’est pas le seul industriel à se positionner, la marque SIKA dont je vous parlez assez régulièrement, propose également ses propres solutions.
Consulter le site SIKA sur les produits de cool roofing.
Bac Acier se met au cool roofing ? Non
Et bien non.
Alors que le principal acteur du marché, le très sérieux « Bac acier » est au devant de la scène, rien ne semble bouger de ce côté là.
Certes, les bac aciers « blancs » existent depuis longtemps et continuent d’être proposés par la marque et ses concurrents directs.
Bizarrement, il ne s’agit pas nécessairement du bac acier en toiture mais plutôt des bardages de façades. Il n’est fait aucune mention de toute forme de synonyme de « cool » sur le site officiel Bac acier, qui ne semble pas vouloir communiquer sur le sujet.
Je trouve cela assez déconcertant, compte tenu que la marque est un réel leader du segment.
J’interprète cette lacune du fabricant par le fait que le bac acier est « de facto » un véritable frein à l’obtention d’une bonne isolation d’une part, et qu’il génère un phénomène de condensation qu’on peine toujours à maîtriser.
Pour atténuer mon propos je dirai qu’en revanche, le bac acier semble être le support qui se destine le mieux au « cool roofing ».
Lire mon article sur le bac acier en toiture.
Les risques du cool roofing
Qui a raison et qui a tort ?
Alors que l’activité s’emballe et que de plus en plus d’artisans s’engouffrent dans cette niche, la question du risque ne fait pas consensus.
En cause : les peintures cool roofing.
Les « pro » peintures estampillées « cool roof » défendent leurs produits et c’est naturel. Or la FFB est plus mitigée sur les résultats.
La veille technique et technologique est frileuse quant au procédé. Il est notamment question de détérioration des membranes (pour les étanchéités polymères) et de mauvaise connaissance des techniques (pour les applicateurs).
La peinture cool roof soulève deux sujets qui font polémique :
- Sécurité et formation des applicateurs (généralement des peintres)
- Intégrité des membranes et éventuelles détérioration de ces dernières après application d’une peinture.
Ci-dessus : Sur le site Enercool, lors de mon screenshot, je remarque que la mise en avant de l’application de la peinture est matérialisée par un gros manque de sérieux en terme de sécurité des personnes.
La question de la sécurité est également mise en avant notamment critiquée dans les promotions audiovisuelles des fabricants, sur lesquelles on distingue clairement des intervenants travaillant dans des conditions habituellement interdites par la CPAM :
Aucune ligne de vie, aucun garde corps, aucune protection individuelle. Je condamne évidemment cette démonstration commerciale de la « facilité » de mise en œuvre qui fausse dangereusement le débat de l’accidentologie dans les métiers du bâtiment (voir photo ci-dessus).
Alors qui dit vrai, et qui fausse la donne ?
Lire l’article de Batirama sur les risques du cool roofing.
L’avis de l’expert
Mon avis personnel et professionnel est simple.
Le cool roofing pour sauver la planète en participant à l’amélioration de l’effet Albedo me semble très pertinent. Or, comme je le répète assez souvent, il se heurte au paradoxe du photovoltaïque qui lui est par essence, noir.
Pour réduire l’effet désastreux des ilots de chaleur, encore une fois mon avis est favorable. C’est un indéniable atout pour atténuer la chaleur au voisinage des toitures.
En revanche, en ce qui concerne le « confort d’été » et la baisse drastique de la température dans les logements et bureaux, je suis très largement plus perplexe.
Nos systèmes d’isolations sous toiture et sur toiture comme le SARKING, sont devenus très performants en terme de Résistance Thermique « R ». Autrement dit, la Résistance Thermique d’un isolant tire son efficacité contre le froid tout comme le chaud.
Par conséquent, pour le résidentiel, logement individuel et logement collectif, je serai affirmatif : Le cool roofing ne sert à rien !
Cette méthode, selon moi, n’a d’intérêt que dans le cadre des grandes surfaces commerciales et autres locaux immenses, difficiles à tempérer et à isoler par des solutions pérennes.
La peinture « cool roof » me semble très pertinente sur le bac acier, et uniquement sur le bac acier. Du moins, je garde une réserve tant que tous les doutes sur son action sur les membranes d’étanchéité bitumineuses et PVC ne seront pas levés.
Que disent les organismes écologiques sur le procédé cool roof ?
Ici encore les avis sont tranchés. Plutôt en phase avec les propos des différents organismes intéressés, je constate que leurs conclusions sont les mêmes que les miennes.
Le cool roofing semble être efficace pour atténuer les effets d’îlots de chaleurs en zone urbaine, et participe à l’amélioration de l’effet Albedo qui me tient tant à cœur.
D’ailleurs, les pays très chauds connaissent parfaitement le phénomène et se sont montrés parfaitement aptes à le maîtriser depuis des siècles. C’est le cas de la Grèce notamment, dont les bâtiments sont presque tous « blancs ».
Vous retrouverez souvent mentionné le terme « ICU » qui est l’acronyme de l’effet d’Ilot de Chaleur Urbain.
En revanche, il s’agit que les process de fabrication des produits dits « cool roof » ne soient pas énergivores au point de rendre nul leur bilan carbone. Dans ce cas, l’effet recherché serait contre productif.
Lire l’excellent article de ReporTerre.net sur le sujet du cool roofing.
Attention à la décennale étanchéité !
Pour ajouter au dilemme, voilà que la décennale s’en mêle !
Du moins, la décennale plutôt que de s’en mêler, se retire du jeu. Les peintures « cool roof » sortent de l’encadrement de la garantie.
Pire encore, c’est un critère aggravant.
En effet, comme je l’évoque très largement lors d’un de mes précédents articles, la décennale étanchéité est très certainement la plus difficile à obtenir quand on est artisan. Par conséquent, le sujet est réel.
Lire mon article directement en lien, sur la décennale étanchéité.
Or, et c’est un fait, les assureurs ne veulent tout bonnement pas prendre en charge les travaux de cool roofing toutefois, dans sa forme « peinture ».
Alors, il se pose deux questions très claires et dont les conséquences sont redoutables :
- Est-il légalement possible de réaliser une application de peinture cool roof sans être assuré ?
- Que dire de la garantie de l’étancheur au premier rang, celui qui avant le cool roof, a posé les membranes d’étanchéité ?
Nous sommes bel et bien face à un paradoxe.
Dans la première assertion la réponse est catégorique : C’est NON ! On ne peut décemment pas intervenir sur une toiture sans être assuré en décennale pour l’ouvrage effectué. On est clairement : Hors la loi.
Pour la seconde assertion, j’imagine que les juristes vont s’arracher les cheveux à définir la responsabilité entre l’étancheur et le peintre.
Connaissant la doctrine, je ferai simple : Il y aura nécessairement « déchéance » de garantie décennale dans ce cas.
Autrement dit, pour le client final, c’est un risque démesuré.
Conclusion
Le cool roofing est anecdotique si l’on se réfère aux données de la FFB (Fédération Française du Bâtiment). Cela serait efficace dans seulement 5% des cas de figure au dire de la fédération.
La pertinence du procédé est largement balloté, selon les sources, en ce qui concerne son efficacité pour rafraîchir les logements et autres bureaux. Son utilité n’est cependant pas nulle, car il y a un réel impact sur l’effet de chaleur en îlot urbain.
En revanche, pour la planète et qu’on le veuille ou non, cela redonne de l’effet Albedo, précieux pour réguler les températures et sur ce point, c’est un bon coup de pouce.
Merci pour vos lectures et bon chantier.
Serge USTUN.