Fermeture provisoire : Les bonnes pratiques côtoient les mauvaises sur bien des dossiers. Cette discipline qui pourtant est hautement stratégique, n’est toujours pas perçue comme un acte du bâtiment, mais comme une corvée.
La fermeture provisoire : Après sinistre
Sujet hautement sous estimé, la fermeture provisoire est un acte technique que je défends depuis de nombreuses années. C’est certainement l’acte technique le plus brutalisé par les entreprises spécialisées en après sinistre, alors que paradoxalement, c’est la première marque de sérieux qui devrait être imposée lors d’une intervention.
Qu’est-ce qu’une fermeture provisoire ?
En après sinistre (où bien dans d’autres cas particuliers), la fermeture provisoire est l’acte par lequel nous allons sécuriser un accès, bien souvent totalement ou en partie impacté : Incendie / Effraction / Tempête.
- Porte d’entrée.
- Fenêtre ou porte fenêtre.
- Baie coulissante.
- Porte de garage.
- Portillon d’accès.
- Etc.
Dans tous les cas le but est simple : Il s’agit de fermer l’enveloppe du bâtiment de manière à préserver les lieux, sécuriser les biens ou protéger les personnes, y compris celles qui par mégarde seraient curieuses de pénétrer un bâtiment sinistré.
Les cas de figure les plus courants étant l’incendie, les effractions et les sinistres « tempête ».
Cependant, et même s’il est d’usage que ces fermetures soient « sommaires », il apparaît que cette étape pourtant importante soit méconsidérée, et disons le clairement, bâclée.
C’est très exactement ce que nous allons voir dans le détail.
Les bonnes et les mauvaises pratiques en fermeture provisoire
La fermeture provisoire, lorsqu’elle n’est pas réalisée par un menuisier ou un serrurier en urgence, est généralement mise en œuvre par les équipes de décontamination en après sinistre : La « déconta ».
Or, comme je l’évoque très précisément dans plusieurs de mes articles, c’est ici que bien souvent le travail réalisé n’est pas acceptable. Une fermeture provisoire doit être « conçue » de façon plus professionnelle.
- Lire mon dossier sur l’après sinistre.
- Consulter mon article sur les entreprises spécialisées en après sinistre.
Premier exemple : L’accès bloqué
Ci-dessus : Mesure provisoire effectuée en 4 panneaux d’OSB vissés. C’est une mauvaise pratique. Crédit photo : S.USTUN.
Dans l’exemple ci-dessus, l’intervenant utilise 4 panneaux d’OSB qu’il visse dans la maçonnerie. Ce faisant, il bloque l’accès aux experts, aux équipes techniques (EDF ou GDF) et n’offre aucun intérêt en terme de sécurité. Un simple coup d’épaule permettra d’ouvrir l’accès.
Autrement dit, cet exemple est un exemple type de ce qui ne faut pas faire. Ici, une porte de service aurait parfaitement fait l’affaire, pour un coût très légèrement supérieur aux 4 panneaux d’OSB : Moins de 90 euros la porte avec un barillet de chantier.
Le résultat serait non seulement plus professionnel, plus sécuritaire mais permettrait d’ouvrir l’accès en cas de besoin.
Second exemple : Une fermeture provisoire dangereuse pour les intervenants
Ci-dessus : Une fermeture provisoire inutile et dangereuse. Crédit photo : S.USTUN.
Dans l’exemple ci-dessus, la fermeture provisoire est inutile et dangereuse. Les pointes sortent littéralement de l’OSB et sont prêtes à blesser quiconque circule dans les lieux. Un « rapiècement » est effectué pour je ne sais quelle raison, et le tout n’est pas solide, n’interdit en rien l’accès, et présente un fort risque d’accident.
Encore une fois, nous voyons bien que dans ce cas, ce sont des équipes non formées qui ont procédé à la fermeture provisoire. C’est une hérésie.
Dans ce cas, il suffisait simplement d’évacuer les reliquats de vitrages cassés, et de réutiliser les montants des châssis de menuiserie pour simplement remplacer le vitrage par des panneaux de CP ou d’aggloméré. Ainsi, avec un simple contreventement des panneaux, les baies pouvaient être utilisables (fermeture et ouverture), et l’accès vraiment sécurisé sans qu’il ne présent de risque (clous ou vis sortants).
Enfin, dans ce cas précis, la mesure provisoire vient « abimer » les pannes en aluminium, qui n’étaient pas impactées. Autrement dit, la fermeture va peser (financièrement) encore plus sur le dossier que si rien n’avait été mis en œuvre : C’est totalement contre-productif.
Troisième exemple : Une ossature intermédiaire, bonne pratique d’urgence
Ci-dessus : Je vais créer une ossature sommaire intermédiaire avec peu de matériaux pour réaliser une mesure provisoire de fermeture. Crédit photo : S.USTUN.
Dans le cas ci-dessus, je me déplace personnellement pour évacuer le travail des intervenants initiaux, et « préparer » une ossature cohérente que mes intervenants viendront consolider. C’est un exemple sommaire mais révélateur.
Avec de simples chevrons de récupération, il est possible de créer un fond de clouage qui sera adapté pour recevoir un voile de contreventement en OSB sans pointe apparente et sans risque de fluage. En outre, j’ai prévu un montant intermédiaire qui permet d’accueillir une porte de service qui autorisera l’accès au garage.
- Coût total de l’opération : Moins de 200 euros avec la porte de service et le barillet de chantier.
- Ce qu’il faut retenir : L’OSB n’est pas fait pour fermer des ouvertures qui ne disposent pas d’une huisserie. Alors créez en une !
Qui doit réaliser la fermeture provisoire ?
Réaliser une fermeture provisoire permet de s’assurer qu’il n’y aura pas d’accident supplémentaire dans (ou au voisinage) des locaux impactés. Mais cela doit également permettre d’assurer un accès aux experts, aux services publics, et aux métreurs en totale sécurité.
Réaliser une fermeture provisoire est également un « premier pas » vers le métrage définitif.
Pour toutes ces raisons, je reste sur ma position initiale, et je confirme que la fermeture d’urgence doit être réalisée par un homme de l’art, autrement dit un professionnel :
- Serrurier confirmé.
- Menuisier.
- Maçon ou charpentier.
Vous l’aurez compris, ce sont les équipe du « bâtiment » et non les équipes de « déconta » qui sont prioritaires sur les mesures provisoires. Cela doit être acté comme un reflexe élémentaire pour toute entreprise qui œuvre en après sinistre.
Si toutefois vous n’êtes pas staffé pour ce type d’interventions, rien n’interdit de recourir aux services d’un sous traitant, bien au contraire.
En résumé, dès lors qu’il s’agit d’une mesure d’urgence en fermeture des accès : Pensez « bâtiment ».
Avantages de réaliser une fermeture provisoire adaptée
Le premier avantage d’une fermeture provisoire correctement réalisée est la marque de sérieux que vous apportez à votre profession. Il ne s’agit donc pas de bâcler cet ouvrage, même s’il n’est pas destiné a rester en place.
- Bonne gestion des matériaux : Les portes de services sont réutilisables à l’infini.
- Sécurité des personnes et des biens : Les OSB sommairement montés sont des sources d’accidents.
- Propreté et sérieux de l’intervention : C’est votre image de marque qui sera jugée !
- Prise de cotes immédiate permettant d’anticiper la commande des menuiseries.
Il n’y a que des avantages à concevoir la mesure provisoire comme un acte « semi définitif ». D’autant qu’il s’agit également de garder un minimum d’amour propre, surtout lorsque vous facturez une intervention 500 ou 600 euros HT pour la pose de trois malheureuses plaques d’OSB.
Comment facturer une fermeture provisoire ?
Comme pour tout le reste dans le bâtiment, il est hors de question de s’en tenir à une simple ligne : Fermeture …. 600 euros HT.
Il faut décrire dans le détail les éléments mis en œuvre, afin de pouvoir justifier du montant facturé. Je vous donne un exemple acceptable :
- Purge du tableau pour recevoir une huisserie provisoire : …. HT
- Création d’une ossature intermédiaire ou d’une huisserie adapté à l’ouverture existante : …. HT
- Fermeture de l’ouverture par fourniture et pose de panneaux d’agencement de type OSB : …. HT
- Mise en œuvre d’un accès de service, etc.. : …. HT
- Calfeutrage (si nécessaire), évacuation des déchets et mise en centre de tri … etc. : …. HT
- Déplacement : …. HT
Essayez au moins de justifier le montant facturé par ce types de lignes explicatives, et non une simple phrase assortie d’un montant.
Les BPU existants
Tous les BPU (Bordereaux de Prix Unitaires) ne disposent pas de lignes spécifiques aux mesures d’urgences comme la fermeture provisoire. AXA et IMH ont des lignes attitrées mais de souvenir, ce sont les deux seuls.
Dans le cas d’une ligne existante au BPU, utilisez là simplement en l’adaptant à la situation. Dans tous les autres cas, évitez les lignes de type « forfait » et décrivez précisément vos actes comme nous l’avons vu dans le paragraphe précèdent.
Vous tomberez tôt où tard sur un expert qui rayera votre devis ou pire, votre facture. Il sera parfaitement légitime pour ce dernier de refuser un ouvrage sommaire, surtout si ce dernier est « fortement » valorisé en prix. Prudence.
Lire mon article sur les BPU (Bordereaux de Prix Unitaires).
La sécurité des personnes et des biens
Je mets l’accent sur ce point car la grande majorité des fermetures provisoires que j’ai vu dans ma carrière sont plus accidentogènes que protectrices. Or c’est justement ce que nous cherchons dans cet acte : Fermer les lieux, et protéger les personnes et les biens.
Vous devez traquer les fermetures réalisées à « la va vite » avec des plaques d’OSB qui ne sont pas solidaires en contreventement, et dont les clous ou les vis dépassent de leurs supports.
Une blessure ou pire, un arrachement au vent d’une plaque d’OSB engendrant un accident vous coûtera bien plus cher qu’une belle ossature bois sommaire mais solide, et le soin d’une pose correctement réalisée.
Je souhaite vivement que cet article entre dans la doctrine des bonnes pratiques en après sinistre, aujourd’hui brutalisées par des intervenants non qualifiés.
Merci pour vos lectures et bon chantier.
Serge USTUN.