Sinistre sécheresse, agrafage, et enfin reprise en sous oeuvre : Pendant combien de temps serons nous encore garanti d’une indemnisation reprise en sous oeuvre ?
La question n’est pas dépourvue bon sens.
Comprenons nous bien, dans cet article je n’évoque pas le temps dont vous disposez pour être indemnisé en cas de sinistre sécheresse.
Je fais le point sur la capacité de prise en charge des sinistres à terme, autrement dit : l’avenir de l’indemnisation en matière de RSO (Reprise en sous oeuvre).
Avant propos
Cet article vise à enrichir mon dossier sur la reprise en sous oeuvre qui demeure le tronc commun de la thématique. Ce dernier n’est donc pas figé, et sera également enrichi au fur et à mesure que j’élargirai le champ de ma réflexion.
Au vu des coûts colossaux qu’impliquent les réparations en sinistre sécheresse, et notamment la RSO, il est légitime de se demander si l’indemnisation ne va pas rapidement être remise en cause.
C’est un sujet « chaud » qui commence à faire débat.
Le sinistre sécheresse devient-il la norme ?
Ce qui était de l’ordre de l’exceptionnel tend à devenir la norme. Le retrait gonflement des argiles est une plaie !
Les sinistres sécheresse sont tellement nombreux qu’il est légitime de se demander si toutes les constructions ne seront pas touchées à terme.
Nos donneurs d’ordres, les assureurs, sont aujourd’hui « protégés » par le statut de la catastrophe naturelle, qui implique le déclenchement ou non d’une indemnisation. En d’autres termes, cela ne se produit qu’après la parution d’un arrêté.
Pour info, le fonds Barnier qui permet d’accompagner les collectivités et les particuliers sur un ensemble de mesures concernant les risques majeurs s’élevait à 200 000 millions d’euros l’années dernière. Or, cette somme ne concerne pas nécessairement les indemnités en réparation.
Dès lors, il est assez aisé d’imaginer un montant global des indemnisations de plusieurs centaines de millions d’euros, sur l’ensemble du territoire.
C’est une somme colossale.
Et oui !
Lire mon dossier sur les sinistres dus à la sécheresse.
Les niveaux d’indemnisations
Le problème du sinistre sécheresse ou « retrait et gonflements des argiles » est qu’il affecte les fondations et génère de lourds désordres.
L’indemnisation peut être rapidement actée lorsque cela ne concerne que des désordres mineurs.
En revanche, toute aggravation engendre des dégradations structurelles qui peuvent rapidement devenir problématiques :
- Désaffleurement de la dalle intérieure
- Désaffleurement des dalles extérieures
- Fissuration des murs
- Péril de la construction
Les niveaux d’indemnisations peuvent être multiples. De quelques centaines d’euros pour un agrafage de fissures, à plusieurs dizaines de milliers d’euros pour une reprise en sous oeuvre.
Malheureusement, dans la plus part des cas, le panier d’indemnisation dépasse allègrement 30 000 euros. Ce montant peut rapidement grimper selon la gravité du sinistre et la typologie de la construction.
Evidement, c’est l’expert qui évalue les dégâts et qui consulte les entreprises pour obtenir un montant de travaux. Or, selon les contextes, il n’est pas rare de passer la barre des 50 000 euros de travaux.
Pour info : Certains sites annoncent un coût moyen d’une reprise en sous oeuvre à 5000 euros. C’est évidemment faux. Après des années sur le terrain, je peux vous assurer que le « panier » moyen d’une RSO est plutôt proche de 30 000 euros.
Le risque de suppression de la garantie ?
Ce haut niveau d’indemnisation implique un gigantesque coût à supporter. Or, la reprise en sous oeuvre n’est pas la seule action en après sinistre couverte par les catastrophes naturelles.
Ces dernières années ont été pour le moins mouvementées !
- Grêles : Lourds travaux de charpente et de remplacement des menuiseries (volets roulants essentiellement).
- Inondations : Travaux sur les voieries, indemnisation des particuliers, etc.
- Sécheresses : Conséquents travaux de consolidation des fondations, engendre également du second oeuvre.
- Séismes : Le pire cas de figure.
- Etc.
La liste est longue, et les dossiers s’accumulent. Dorénavant, chaque année, ce sont des centaines de décrets qui qualifient l’état de catastrophe naturelle dans nos communes, partout sur le territoire.
Aucune ville n’est épargnée.
Le remplacement de la CATNAT
Le risque va très certainement « muter ». Autrement dit, il semble évident que l’État et les acteurs de l’assurance vont revoir leur copie.
Il est assez aisé d’imaginer que la reprise en sous oeuvre, contrairement à la grêle ou aux inondations, est tout à fait « prévisible » par le biais des analyses de sols et des procédés de construction.
Si le risque est prévisible, alors il doit être traité en amont, avant toute construction.
La question, encore une fois légitime, est de savoir si le « risque » et dès lors l’indemnisation d’une reprise en sous oeuvre vont perdurer.
Les fondations à revoir en préventif
Le risque est prévisible dorénavant.
Dès lors, la réglementation sur les semelles de fondations ne va t’elle pas également évoluer vers un dimensionnement plus important ?
Plus de béton, plus large, plus profondes et plus d’armatures ?
En outre, il semblerait (mais cela reste à déterminer avec exactitude) que les dalles portées supportent moins les retraits et gonflements des argiles (RGA) que les constructions sur vide sanitaire.
Nous avions évoqué la question lors du Podcast réalisé avec Francis Delbreuve. Il semble que le vide sanitaire soit un « plus » en terme de pérennité face aux sinistres.
Cela induit une question légitime : Les vides sanitaires vont-ils être imposés à l’avenir pour tout type de construction ?
La reprise en sous oeuvre se développe
Les entreprises spécialisées en après sinistre le savent. Le développement de leur activité passe aujourd’hui nécessairement par la reprise en sous oeuvre (RSO).
C’est une évidence.
Les entreprises qui maîtrisent le sujet aujourd’hui, seront les leaders de l’après sinistre de demain. Certains ne s’y sont pas trompés et leur activité explose de manière exponentielle.
La RSO étant un métier très technique, les enjeux sont à la hauteur de la tâche. Les entreprises de maçonnerie doivent d’ores et déjà songer à se spécialiser dans ce domaine.
J’avais déjà évoqué le sujet lors de ma dernière conférence en prospective des métiers du bâtiment et de leur transformation progressive.
- Formation des équipes techniques.
- Achat ou location de machines (pour les micros pieux).
- Établissement d’une offre adaptée.
- Recrutement de métreurs spécialisés.
Il existe aujourd’hui un enjeu majeur à former les personnels intervenant sur les sinistres sécheresse en bâtiment. Des métreurs, en passant par les experts et surtout, les intervenants opérationnels : Les maçons.
- Lire mon article sur la reprise en sous oeuvre.
- Lire mon dossier sur les entreprises spécialisées en après sinistre.
Le drainage périphérique : Une solution préventive
Lors d’une discussion technique avec un confrère, ce dernier mettait en avant les qualités d’un drainage périphérique. Ce dernier peut éviter les désordres dus à un retrait gonflement des argiles (RGA).
Encore faut-il que le drain soit correctement dimensionné et bien mis en oeuvre.
Comme le vide sanitaire, le drain peut éviter une lourde et coûteuse reprise en sous oeuvre, cependant il doit être adapté. Un drain en pied par exemple, s’il n’est pas correctement appréhendé, peut engendre plus de problèmes que l’absence de drain.
Les ouvrages de géotechnique sont de vrais spécialités, il ne s’agit pas de travailler de manière empirique. Une mauvais appréhension du dossier peut être lourde de conséquence.
Lire l’article de la SAMSE sur le sujet.
A lire également :
- Fonds Barnier : Explications sur le site Georisques.gouv.fr
- Article intéressant du site Prevention BTP sur la reprise en sous oeuvre
Conclusion
L’indemnisation des travaux de reprise en sous oeuvre est un sujet très « chaud ». Il y a fort à parier que les donneurs d’ordres vont tôt ou tard s’extraire de ce risque, tant il est coûteux ! On ne parle pas ici d’un simple dégât des eaux qu’un forfait de 1000 euros peut résoudre. On parle de travaux lourds, anxiogènes et surtout : Terriblement onéreux.
C’est une affaire à suivre de près.
Merci pour vos lectures et bon chantier.
Serge USTUN.