Il ne fallait pas attendre plus longtemps avant que l’IA (Intelligence Artificielle) ne vienne aider les fraudeurs à inventer des dégâts des eaux fictifs. Quoi de plus simple, car les photos générées par l’IA sont aujourd’hui bluffantes de réalisme, même les pros se font berner !
Sujet amusant en première lecture, le phénomène cache pourtant un risque réel, notamment l’impact financier auprès des assureurs mais surtout la remise en cause d’un nouveau métier : L’expertise à distance.
Ayant formés des dizaines de jeunes experts sur le chiffrage et l’expertise à distance, je ne pouvais pas passer à côté de cette fraude sans l’évoquer ici.
La fraude à l’assurance par l’IA, c’est mon dossier du jour.
Vous pensiez que la fraude ne touchait que les assurances de véhicules ? Et bien non, le dégât des eaux devient aujourd’hui la cible privilégiée des fraudeurs.
Génération de l’article au format Podcast via Notebooklm :
Dégâts des eaux : La fraude à l’assurance par l’IA interposée !
Et si ChatGpt devenait le compère malicieux des fraudeurs à l’assurance ? Si Grok devenait le complice d’un délit en truquant des photos réalistes imitant l’impact d’un dégât des eaux sur vos murs ou vos plafonds ? Cela peut sembler amusant, il n’en est rien. Ce phénomène s’amplifie est devient pour le moins inquiétant.
Oserai-je rappeler que la fraude aux assurances est un délit ?
On enquête : Test d’une IA pour générer un faux dégât des eaux
Quoi de plus simple que de réaliser un test pour en vérifier la pertinence ?
Dans bien des cas, notamment pour les dégâts dont l’indemnité est inférieure à 1600 euros, le gestionnaire de compagnie vous demande simplement des photos du sinistre. On passe alors sur un procédé simple : le chiffrage à distance.
C’est mon métier, et j’ai formé de nombreux jeunes métreurs et experts pour mener à bien ce type d’expertise. Le but : Aller vite pour traiter les dossiers de fréquence.
Dès lors, si les photos sont générées par l’IA, il devient simplicime de frauder ! Et bien faisons le test.
Le test avec ChatGpt :
Pour ce test, rien de plus simple. J’ai demandé à ChatGpt de générer, ou plutôt de simuler, des moisissures sur mes murs et mon plafond afin de recréer un simulacre de dégât des eaux. Pour cela, j’ai simplement pris une photo avec mon smartphone, photo immédiatement transmise à l’IA pour le test. Le résultat est (presque) bluffant.
Même s’il est vrai qu’un expert aguerri pourrait déceler la fraude sur cet exemple, il est également important de rappeler que j’ai réalisé ce test en 5 minutes chrono. Autrement dit, en peaufinant un peu j’imagine aisément que le subterfuge serait indécelable.
Certes, quand on a expertisé des centaines de plafonds et murs, l’œil peut immédiatement s’alerter sur des simulations grossières. Mais il peut également être trompé si les prompts et l’IA sont de qualité. En conclusion, je pense que même un expert confirmé pourrait être mis en échec.
Je vous rappelle que c’est ma grande spécialité et que les moisissures sur les murs et plafonds n’ont plus aucun secret pour moi. J’ai même rédigé un dossier complet avec une analyse précise et exhaustive sur ce sujet : Causes, impacts sur les supports, traitements, etc. Lire mon article sur les moisissures.
En revanche, avec une IA spécialisée dans la génération de photos réalistes, je pense sincèrement que je serai berné. L’illusion peut être parfaite avec les bons prompts.
Le test avec Grok :
Avec Grok, le test est réellement pertinent même si ce dernier modifie l’architecture de la pièce ! En revanche, le réalisme est là, c’est bluffant ! Les différences de coloration sur les zones impactées, les formes aléatoires, le schéma global est : impressionnant.
Prompt : « Bonjour Grok. A partir de cette image, peux tu générer la présence de moisissures pour simuler un dégât des eaux, à l’angle au droit du plafond et des murs. »
Le réalisme des moisissures est sans conteste. C’est un fake réellement pertinent qui avec un peu de travail sur le prompt mettrait n’importe quel expert en déroute. Je précise que je n’ai pas travaillé sur le prompt et que l’opération à pris 2 ou 3 minutes à peine.
Imaginez un fraudeur qui dispose du temps suffisant pour générer des photos plus réalistes encore.
Qu’est-ce que l’expertise à distance ?
L’expertise à distance est devenue chose courante. Pour les dossiers dits « de fréquence », dont les montants d’indemnisations ne sont pas élevés, ce type d’expertise est devenu la norme. La raison est simple et surtout légitime : On évite les déplacements inutiles.
Un expert (ou un métreur) peut aujourd’hui réaliser son expertise ou son chiffrage sans se déplacer. Les smartphones et les tablettes permettent deux choses (ou trois) :
- Prendre des photos du dégât avec une excellente qualité.
- Dialoguer en visio avec l’expert.
- (parfois) réaliser un métrage si l’appareil est équipé d’un capteur LiDar.
La simplification des règles d’indemnisation en matière de sinistre joue un jeu important dans l’évolution de ce nouveau métier qu’est l’expertise à distance. C’est grandement grâce à l’IRSI que ce model s’est développé et je le précis : C’est un bienfait pour tous.
Le gré à gré faisant le reste, et par conséquent aucun expert ne se déplace car l’assurance propose une indemnisation directe : C’est futé !
Comprendre la convention IRSI.
Comment se déroule un chiffrage à distance ?
Le chiffrage ou l’expertise à distance est une « routine » très simple. Le gestionnaire vous demande 3 photos, guère plus, et vous demande de mesurer la pièce impactée. En fonction de la gravité (basée sur le visuel), le gestionnaire va définir un montant d’indemnité correspond à la remise en peinture.
Si vous acceptez ce montant, le dossier est clos et la fraude à fonctionné ! Évidemment, si le montant est trop élevé, le risque d’envoyer un expert physiquement sur les lieux est grand. Dès lors, les fraudeurs se cantonnent à des petits dégâts, qui seront rapidement réglés.
Cependant je le rappelle, c’est un délit qui est sanctionné (lourdement) par la loi. Alors ne courrez pas sur Grok après avoir lu cet article !
Lire mon article : Le chiffrage à distance.
Pourquoi l’expert ne se déplace pas systématiquement ?
Lorsque les sommes sont peu élevées, que le dégât est clairement identifié (infiltration par toiture, fuite d’eau au droit d’un tuyau, inondation chez le voisin du dessus), le déplacement de l’expert n’est pas systématique. Si l’état des lieux ne laisse aucun doute quant à la cause du dégât, qu’il est inutile d’investiguer, et que les impacts engendrent de simples travaux de plâtrerie et de peinture : A quoi bon se déplacer ?
Les démarches RSE privilégient l’économie de déplacements dont on sait qu’ils sont polluants.
L’avenir du chiffrage à distance remis en cause
Évidemment, nous pouvons légitimement nous demander si cette fraude aux assurances par l’IA ne va pas remettre en question l’expertise à distance. Je vous rassure, la réponse est non.
En effet, il est possible d’utiliser des logiciels ou des applications spécialisées (de type visio) pour réaliser une expertise. Ces applications sont nombreuses et beaucoup sont gratuites.
Autrement dit, la seule expertise sur photo ne représente pas un cas généralisé mais plutôt un cas de simplification poussé de la procédure. On demande 3 ou 4 photos et on clôture le dossier (je schématise évidemment). Si la fraude se développe, alors les visios seront généralisées et dans ce cas, il sera bien plus difficile de générer des moisissures en temps réel, même pour une IA professionnelle.
Par conséquent, je pense qu’il est actuellement inutile de s’alarmer mais que nous devons veiller à l’évolution de ces pratiques délictuelles et surveiller la progression de l’IA.
Liens utiles
Conclusion
Les fraudes ont toujours existé. En revanche, la fraude à l’assure par IA semble devenir un véritable sport national. Un joli pied de nez de l’IA car pour rappel, les assureurs ont misé des sommes astronomiques pour développer des IA dans la gestion automatisée des sinistres. C’est pour le moins amusant, car la situation de l’arroseur arrosé n’a jamais été aussi pertinente, et cela prête à sourire.
Nous devons évidemment surveiller ce phénomène et ne pas perdre de vue que le travail de l’expert demeure pour le moment irremplaçable, et cette actualité légitime d’autant plus la profession.
Affaire à suivre.
Merci pour vos lectures et bon chantier.
Serge USTUN.